Le fonds Cavaniol tout en haut de l’affiche

En soi et vu le contexte planétaire sur le sujet migratoire, cette vieille affiche de cinéma est déjà pleine d’intérêt. Parce que selon la revue Hommes & migrations, éditée par les services du beau palais de la Porte Dorée à Paris, le film « O Salto » est considéré comme le premier film sur l’immigration clandestine, en l’occurrence portugaise. Pour illustrer ce long métrage (1966) de Christian de Chalonge, la réalisation de l’affiche a été conçue en offset couleur. Et, selon la notice qui l’accompagne, par René Ferracci. Elle est l’une parmi 2000 autres qui vont constituer un fonds au sein du Musée de l’Histoire et de l’Immigration et peut-être même faire l’objet d’une exposition dès 2022. Le fonds s’intitulera le « fonds Cavaniol », du nom de son donateur. Une histoire démarrée il y a une vingtaine d’années… Continuer la lecture

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Une histoire d’Hamlet sur un carré de moquette grise

“Être ou ne pas être, telle est la question.” Cette réplique connue de tous, même des non-initiés, sans doute la plus célèbre du répertoire, qui ouvre l’un des monologues d’Hamlet (Acte III, scène 1), résonne d’une bien étrange manière en ces temps si particuliers. Méditation sur la vie et sur la mort, elle pourrait s’entendre aujourd’hui en ces termes : “Jouer ou ne pas jouer.” Alors, oui, jouer, malgré tout. Jouer devant un petit nombre de professionnels, en attendant un vrai public. Jouer pour exister. Quelques spectateurs clairsemés dans la salle, habituellement signe d’un spectacle mal aimé, reçoivent tel un cadeau inespéré cette représentation qui s’offre à eux. Donner et recevoir, telle est la relation fusionnelle qui unit un acteur à son public. Car si les acteurs ont besoin d’une écoute pour exister, le public, lui, a besoin qu’on lui raconte des histoires. La relation, vivante, est à double sens, comme en miroir, avec l’imaginaire en partage. Nous avons besoin les uns des autres pour exister. C’est un fait. À bon entendeur… Continuer la lecture

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MH370, le roman d’un mystère

À part la piste Benalla, on peut dire que Florence de Changy a à peu près tout exploré avant de se faire une conviction. Dans la réédition augmentée de son enquête qui vient de paraître, cette journaliste correspondante du Monde et de RFI a en effet passé au peigne fin toutes les hypothèses, de la plus simple aux plus mirobolantes. Son travail autour de la disparition en mars 2014 du Boeing 777 de la la Malaysia Airlines, se lit comme un roman, le roman de tous les mensonges. Selon elle, « lorsqu’il existe plusieurs explications possibles à un problème, celle qui exige le moins d’hypothèses nouvelles et qui cadre le mieux avec ce que l’on sait déjà de situations semblables est généralement la bonne ». Une idée écrit-elle, rejoignant le principe américain KISS (keep it simple stupid), lequel privilégie un scénario basé sur une bête catastrophe à bord mais d’une telle ampleur que l’appareil se serait volatilisé. Tout le reste ne serait, avec cette approche, qu’une somme de nœuds ineptes agrégés dans nos cerveaux fertiles. Continuer la lecture

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Le petit mot d’Irène

Si l’on en juge par l’examen minutieux de quelques traces, il est possible que cette photographie retrouvée soit de type polaroid. Les clichés de ce genre sortaient en effet à peine secs de la machine et les quelques étirements et bavures de gris que l’on discerne dans le fond en sont peut-être la preuve. Mais peu importe, c’est le sujet ou plutôt le double sujet qui compte puisqu’il s’agit au premier plan de l’artiste Irène Lagut et au second, du portrait qu’elle fit de Guillaume Apollinaire après l’hospitalisation de ce dernier pour blessure de guerre en 1916. Du portrait réalisé par Irène Lagut à cette époque, on connaît à peu près son itinéraire car il a été renseigné en 2006 lors d’une vente aux enchères chez Christie’s. De style disons indo-byzantin, il a notamment été exposé à l’Historial de la Grande Guerre de Péronne dans le cadre de l’exposition « Apollinaire au feu » en 2005. Continuer la lecture

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Opéra par ci, classique par-là

Si le vinyle fait son grand retour depuis quelques années, le CD s’accroche en deuxième position, et le monde lyrique tout entier pousse des cris d’extase depuis la sortie du disque de notre baryton-Verdi national et international, le marseillais Ludovic Tézier. Rien d’anodin à ce qu’il ait attendu d’avoir 53 ans pour sortir son premier disque solo, lui qui aurait pu le faire depuis longtemps. Mais il se distingue depuis toujours par son respect absolu de son «instrument», comme on dit, par une intégrité quasi unique dans ce monde pressé et stressé. Une intégrité doublée d’une ascèse, car on ne triche pas avec la voix à l’opéra. Lors d’une interview récente dans Le Monde, le 26 février dernier, à propos de la sortie de ses œuvres lyriques complètes chez Warner-Classics, Natalie Dessay va jusqu’à parler d’une vie de «sacrifice», à laquelle elle a mis fin à 48 ans. L’opéra exige une vie de rigueur et d’ascèse, en tout cas, ce qui nous rend béats d’admiration devant ce premier CD Tézier. Bien sûr les barytons ont cet avantage sur les ténors de ne pas craindre comme eux le passage du temps souvent cruel pour le registre léger et aigu, comme le démontre Placido Domingo, brillamment reconverti au fil des ans de ténor à baryton, jouant les prolongations à près de 80 ans. Continuer la lecture

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L’exil sur un air de blues

Comme tous les théâtres de France, le Mouffetard – Théâtre des arts de la marionnette vit depuis maintenant plus d’un an en vase clos, à savoir sans public. Jonglant avec les périodes de confinement, déconfinement, couvre-feu, reconfinement, fermeture des lieux culturels…, il n’a cessé d’annuler, programmer, reprogrammer et annuler de nouveau ses spectacles. Un travail de titan, usant pour les nerfs. Si une parenthèse enchantée lui a permis d’assurer son début de saison (1), celle-ci fut, comme chacun sait, de fort courte durée. Obligé de se “réinventer” (autre terme actuel et insupportable dont nous nous passerions bien), bref, de faire contre mauvaise fortune bon cœur, il n’a pas cessé toute activité pour autant. Accueillir des compagnies en résidence, mettre le plateau à leur disposition pour répéter et créer leurs spectacles, organiser des représentations à l’attention des professionnels, tout cela dans le strict respect des contraintes sanitaires actuelles, semblait alors un moindre mal, un moyen tout du moins de préparer l’avenir. (2) Le spectacle “Rebetiko”, reprogrammé à la saison 2022/2023, a ainsi donné lieu à deux représentations. En voici un avant-goût. Continuer la lecture

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Dufy en suspension

Raoul Dufy ne leur avait certes pas facilité la tâche. Quand les liciers et autres petites mains habiles de Beauvais puis d’Aubusson, habitués à tisser des scènes classiques ont vu arriver le modèle peint par Raoul Dufy pour faire d’un panorama de Paris une tapisserie géante sur paravent, ils ont dû frémir, qui du genou, qui de la moustache, qui du sourcil. C’est d’abord en 1925 que Raoul Dufy (1877-1953) honore une commande du couturier Poiret pour une vue de la capitale à vol d’oiseau. Il l’adapte par la suite pour une commande par l’État d’un paravent. En coloriste chevronné il multiplie les nuances et on imagine sans peine le monstrueux travail des manufacturiers pour coller fidèlement au modèle. Cette œuvre singulièrement plaisante et planante, est sans aucun doute le clou d’une exposition qui devrait ouvrir « prochainement » au Musée de Montmartre comme indiqué prudemment sur l’affiche. Continuer la lecture

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Marius de Zayas en intégralité

Sur cette photo prise en 1928 dans un studio de New York, l’homme a quarante huit ans. Fait remarquable, il est glabre. Alors qu’on l’a déjà vu porter de splendides moustaches et, sur la fin de sa vie, une barbe impériale. Dans tous les cas c’est un bel homme, à la verticalité élégante, avec un regard où l’on voit défiler et son intelligence et sa sensibilité. En 2021 c’est toujours un inconnu sauf de quelques spécialistes. Il faut dire que tout au long de sa carrière, Marius de Zayas a tout fait pour s’effacer et échapper à la postérité. Et pourtant il s’agit d’un artiste exceptionnel, d’un passeur d’art dont la clairvoyance pouvait sans doute se comparer à celle d’Apollinaire. Les deux hommes se connaissaient d’ailleurs et, entre pairs, entre prophètes de l’art moderne,  ils s’étaient vite compris. Guillaume Apollinaire a publié les « absolues » caricatures de Zayas dans le dernier numéro des Soirées de Paris juste avant la guerre et l’autre lui a rendu la pareille en imprimant les idéogrammes d’Apollinaire dans la revue 291, éditée à New York. Continuer la lecture

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Eglise Saint-Serge, un petit paradis orthodoxe à Paris

Pour un peu on aurait passé le numéro 93, coincé entre un salon de coiffure et un immeuble gris de la banale rue de Crimée, sans le remarquer. Pourtant un coup d’œil au travers de sa grille entrouverte suffit à attirer le regard sur l’insolite maisonnette pourpre auréolée de l’icône d’un saint, blottie au fond de l’allée. Elle est une invitation à aller plus avant. Dont acte. Derrière la maison de poupée, l’allée bifurque pour cacher un véritable éden, invisible de la rue, où le temps semble s’être arrêté. Un sentier étroit s’élève parmi les arbres et les fleurs, passant tour à tour devant un atelier, un garage-librairie et des maisons ocres pour s’arrêter devant une bordée de marches. En haut des marches, c’est l’épiphanie. Saint-Serge, une petite église orthodoxe de toute beauté domine ce tableau bucolique. Saint-Serge de Radonège, suivant son nom complet, dépend de l’Archevêché des églises de tradition russe en Europe occidentale dans la juridiction du Patriarche de Moscou. Continuer la lecture

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Le monde et ses couleurs

Le monde pour horizon, l’humain au cœur de l’objectif et une palette de couleurs vives pour signature, tel est l’univers artistique de Steve McCurry. Le photographe américain, né en 1950 à Philadelphie, se définit, en réalité, comme un “storyteller”, un “conteur visuel”. S’éloignant du photojournalisme de ses débuts, l’artiste s’affranchit de toute contrainte et revendique une liberté totale dans la réalisation de ses clichés. Poète d’images et non plus reporter. “In search of elsewhere”, l’exposition monographique qui lui est actuellement consacrée à la Polka Galerie, revient sur les plus grands succès du photographe voyageur. Une plongée vertigineuse dans un univers de toute beauté ! Continuer la lecture

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