Souvenirs de Vienne en flocons

Il était une fois, dans la capitale de l’Empire Austro-Hongrois, en 1900, un artisan, fabricant d’instruments médicaux, nommé Erwin Perzy. En ce temps là, les demeures étaient éclairées au gaz de ville, mais l’électricité faisait son apparition. Pour mieux concentrer la lumière des ampoules installées dans les blocs opératoires, Perzy tenta divers dispositifs, notamment des globes remplis d’eau, faisant office de loupe. Dans lesquels il introduisit des paillettes de mica, afin d’obtenir une luminosité plus importante. Mais cela n’entraînait qu’un bref scintillement, l’implacable loi de la gravitation faisant rapidement choir au fond les particules. Tenace, notre héros réitéra l’expérience en utilisant cette fois des grains de semoule. Lesquels s’imbibant lentement voletèrent comme neige tombant du ciel, avec un résultat meilleur. Fin de la première étape. Continuer la lecture

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Lune de miel

Pour son voyage vers la Lune, Jules Verne faisait son miel de moult détails techniques ce qui ne l’empêchait pas, par moments de tirer quelques salves humoristiques. Ainsi lorsqu’il mentionne, via l’un de ses personnages, l’anecdote suivante: soit une expérience balistique française sous Louis XI qui vit une bombe partie de la Bastille, « un endroit où les fous enfermaient les sages », atterrir à Charenton, « un endroit où les sages enfermaient les fous ».
Au moment où la NASA vient de choisir son module pour renvoyer des astronautes sur la Lune, il apparaît comme fort distrayant de relire « De la Terre à la Lune », par l’indispensable Jules Verne. Lequel avait prévu, en 1865, à peu de choses près, le même temps de parcours qu’en 1969 avec la mission Apollo 11, et la même zone de tir. Continuer la lecture

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Debussy triplement unique

On croit trop souvent qu’il faut toute une éducation pour aimer «Traviata» ou «Faust», alors qu’il suffit de se laisser porter par la musique, l’intrigue, les voix, le décor, les costumes. Car l’opéra, art total, est tout simplement une histoire qu’on nous raconte. Qu’on découvre «Tosca» ou «Othello» ou qu’on les ait vus cent fois peu importe, parce que ces œuvres sont si riches et l’expérience si complète. Alors comment peut-on se contenter, comme en ce moment, de voir ces chefs-d’œuvres lyriques en streaming at home, sur nos petits écrans à nous ? Si l’expérience n’est pas la même, bien sûr, que si on se trouvait dans la salle, elle suffit pour apprécier tous les éléments essentiels : la direction d’orchestre, la mise en scène et les chanteurs. Et à la fin, lorsque tous les talents se sont conjugués au plus haut niveau, on sent qu’on vient de vivre un moment hors du monde comme avec cette nouvelle production de «Pélléas et Mélisande», captée à l’Opéra de Lille le 9 avril dernier et disponible en streaming pendant six mois. Continuer la lecture

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En 1917, Baudelaire sentait encore le soufre

En d’autres temps, un éditeur se serait frotté les mains. Il aurait aisément transformé ce qu’on appellerait aujourd’hui un buzz en juteuse opération commerciale. Une atteinte aux bonnes mœurs, on en rougit peut-être, mais on peut en tirer un certain bénéfice. En réalité, Poulet-Malassis le courageux éditeur des « Fleurs du Mal », se serait bien passé de la condamnation prononcée le 20 août 1857. Et Baudelaire bien plus encore. Ce fameux procès – qui a assuré au substitut Pinard un notoriété inattendue – condamnait l’éditeur, le libraire et l’auteur pour délit d’outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs à une amende de 100 francs pour les premiers et 300 francs pour l’auteur. Baudelaire, qu’on ne peut soupçonner de lésine, dut plaider sa cause auprès de l’impératrice et obtint un rabais. Mais surtout, il fallait supprimer six pièces du recueil. Le livre, tiré à 1100 exemplaires, n’était plus vendable. Il y aura d’autres éditions «expurgées». Quant au substitut Pinard, il sera décoré de la Légion d’honneur l’année suivante. Continuer la lecture

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Cadastre exquis

Lorsqu’en 1965 François Mitterrand acquiert sa maison de Latche dans les Landes, elle n’est alors entourée que d’un maigre terrain de mille mètres carrés. Dans cet environnement immense, c’est selon lui, bien trop peu. Lors de la cession, le propriétaire des lieux et des alentours lui a bien promis trois hectares supplémentaires mais il se ravise car celui qui est devenu l’adversaire du Général de Gaulle, lui hérisse le poil. Dans un livre qui se lit d’une traite tant il dévoile, en filant l’anecdote, certains aspects de la personnalité de l’ancien président de la République, les journalistes Yves Marté et Jean-Pierre Tuquoi expliquent comment et en détails, François Mitterrand parvient à étendre la superficie de son domaine. Avec « l’obstination d’un hobereau », l’ancien chef d’État réussit au terme de son œuvre rurale, à acquérir soixante-dix hectares. Pendant des années, « avec l’attention d’un général penché sur une carte d’état-major », il traque le moindre bout de terrain disponible sur son cadastre exquis. Entre 1965 et 1996, il signe pas moins de trente actes notariés à fin d’extension de son territoire. Continuer la lecture

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Le-Pré-Saint-Gervais : une promenade inattendue, accolée à Paris

Vous cherchez à vous évader de Paris sans franchir la barrière fatidique des 10 kilomètres ? Le-Pré-Saint-Gervais, qui est la plus petite commune de Seine-Saint-Denis accolée à Paris, permet en ces temps de restriction kilométrique de se dégourdir les jambes tout en découvrant des endroits inattendus. Une balade tranquille suit les traces du passé résidentiel et industriel de ce curieux petit arpent de 70 hectares. En partant du métro Hoche (ligne 5), on remonte la rue Hoche et la rue du Pré-Saint-Gervais. À l’intersection de la rue Franklin, bifurcation à droite pour découvrir quelques mètres plus loin un site unique dans toute l’Ile de France : l’usine-rue de la rue Carnot. C’est le seul exemple régional encore sur pied d’usine-rue insérée dans le tissu urbain (ci-dessus). Continuer la lecture

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Pause

À nos lecteurs. Comme chaque année, la parution des Soirées de Paris entame une pause à l’occasion des vacances de Pâques. L’assèchement des activités culturelles dû aux restrictions sanitaires  justifie doublement cet arrêt au stand. La reprise de l’activité est prévue le 19 avril. C’est l’occasion de remercier nos lecteurs et nos contributeurs de leur fidélité et de leur adhésion. À la semaine prochaine!

PHB

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Buster Keaton de chutes en gags

Tout comme son contemporain et ami Charlie Chaplin (1889-1977), Buster Keaton (1895-1966) fut, lui aussi, une légende du cinéma muet. Tel son aîné, il créa un personnage identifiable au premier coup d’œil : un visage impassible, qui ne souriait jamais, sur la tête duquel était vissé un éternel canotier, et une silhouette frêle, de petite taille, dont la souplesse n’avait rien à envier à celle de Charlot. Buster Keaton avait su composer un personnage des plus attachants : introverti, toujours en quête d’amour et téméraire au point de ne pas hésiter à mettre sa vie en danger à travers moult cascades. Après “M comme Méliès”, Molière de la meilleure création Jeune Public 2019 et premier volet d’un triptyque théâtral consacré à la naissance du cinéma, Martial di Fonzo Bo et Elise Vigier, respectivement directeur de la Comédie de Caen et artiste associée, nous invitent à découvrir la figure et l’univers d’un des grands inventeurs du burlesque. Continuer la lecture

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Quelques pseudos d’Apollinaire et un peu plus

Ses amis les plus proches (ceux-là mêmes qui lui doivent d’être passés à la postérité) l’appelaient «Kostro». C’est que le patronyme Wilhelm de Kostrowitzky, avec ses consonances slaves et rocailleuses, n’était pas simple à prononcer, et encore moins à mémoriser. C’est pourtant sous ce vrai nom de baptême (voir document), celui que lui avait transmis sa mère Angelica, que l’écrivain commence sa carrière de journaliste, activité qu’il ne cessera jamais complètement. En février 1902 le jeune Wilhelm de Kostrowitzky signe donc l’article «Le prestige français en Allemagne» dans La Grande France, revue dirigée par deux cousins originaires de l’île de La Réunion, réunis sous le patronyme commun de Marius-Ary Leblond. Quelques mois plus tard, la même revue fait paraitre le poème «Elégie du voyageur aux pieds blessés» signé cette fois Guillaume Apollinaire. Continuer la lecture

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Vol brisé

Pour une maire écologiste poitevine, les premières images du film « Le vent se lève », de Hayao Miyazaki, seraient proprement insoutenables. On y voit un petit garçon dormir près de sa petite sœur. Et voilà que ce polisson, peu au fait des enjeux environnementaux, se met à rêver éveillé. Il grimpe sur le toit de la maison familiale et rejoint un avion miniature juché sur un mât. Quelques tours de manivelle plus tard, avec sa casquette à visière et ses lunettes de protection, le voilà filant dans le vent qui « se lève » dans un de ces paysages à haute densité poétique qui font la caractéristique du maître de l’animation japonais. Il croise aussi dans le ciel des engins de guerre car Miyazaki ne fait pas pour autant dans l’angélisme béat. Sorti en 2013, « Le vent se lève » n’est pas le premier film où il laisse libre cours à sa passion de l’avion qu’en japonais l’on nomme hikouki. Continuer la lecture

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