Copie presque conforme

Celle-là est authentique, par préméditation. Elle a été peinte d’après la vraie « Mona Lisa », quelques dizaines d’années suivant l’œuvre célébrissime de Leonard de Vinci. L’on estime que cette copie a en effet été exécutée vers 1600, peut-être même à Fontainebleau, là où se trouvait l’original acquis par François 1er. Ces renseignements proviennent de la maison Artcurial qui prévoit de mettre cette version aux enchères le 9 novembre à Paris. Elle est estimée entre cent cinquante et deux cent mille euros ce qui semble bien plus abordable que le demi-milliard dépensé il y a peu pour un « Salvator Mundi » dont l’attribution à l’artiste italien a suscité certaines réserves. Le fait que cette « Joconde » soit officiellement une copie voulue comme telle,  est rassurant. D’autant que l’auteur inconnu s’est autorisé certaines libertés qui la valorisent plutôt qu’elles ne désavantagent le résultat, un autre résultat. La lumière, le sourire, certains détails effectivement différents, témoignent quoiqu’il en soit d’un talent et d’une inspiration certains. Continuer la lecture

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L’art de Botticelli, la bottega et le motif itinérant

“Botticelli, artiste & designer”, première exposition en France de l’illustre peintre florentin depuis celle du Musée du Luxembourg en 2003, autant dire un événement… Le titre intrigue néanmoins. En quoi Alessandro di Mariano di Vanni Filipepi, dit Sandro Botticelli (vers 1445-1510) aurait-il été un designer ? C’est un des intérêts majeurs de cette exposition présentée actuellement au Musée Jacquemart-André : montrer l’œuvre de l’artiste sous l’angle du travail collaboratif en atelier (la bottega) et la reprise de “motifs itinérants”, dans les peintures du maître comme dans les arts appliqués, ou encore la réalisation de copies comportant des variantes. Le designer crée un vaste répertoire d’images qu’il réutilise, telle cette Vénus à la silhouette allongée (ci-contre) et à la longue chevelure flottante inspirée de la Venus pudica que l’on retrouve dans nombre de ses œuvres. L’exposition s’attache également à mettre en avant les rapports entretenus par Botticelli avec la culture de son temps et l’influence que lui-même eut sur ses contemporains. Un éclairage savant qui rend cette exposition décidément incontournable. Continuer la lecture

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Point à la ligne

Lorsque les petits poissons de rivière moucheronnent à fleur d’eau, le brochet lui, les surveille depuis le fond, grâce à ses yeux haut perchés. Carnassier, vorace, il opère sa razzia et doit enchaîner sur une lente digestion avec des bulles en guise de sons. Une fois plein, empli comme une jarre, ce n’est donc pas la peine de chercher à le faire venir avec un appât artificiel, un leurre savant ou même un vif bien frais. On pourra dès lors se rabattre sur des quenelles et si elles sont si bonnes c’est parce que justement, manger du brochet, c’est aussi l’assurance de profiter de ses repas à lui. La sauce Nantua vient (ou plutôt venait) parfaire l’ensemble. Admettons que l’on préfère l’hameçonner sans plus de manières, il faut savoir que c’est permis depuis deux décrets de Colbert, lesquels ont officialisé en 1668 et 1670 que le produit de la pêche appartient aux pêcheurs. C’est le retour aux origines de l’homme, puisant ses besoins dans la nature, en pure franchise de TVA. Ce qui nous amène à découvrir le « Guide du pêcheur », publié en 1928 chez Flammarion. Continuer la lecture

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A Bruxelles, des bouquins et des ailes

Comme dans beaucoup de capitales européennes, une foire du livre d’occasion et des vieux papiers se tient régulièrement à Bruxelles. Chaque premier samedi du mois, les amateurs se rendent au cœur du parc du Cinquantenaire, à quelques centaines de mètres du quartier de l’Europe. Ils viennent chiner auprès d’une quarantaine de libraires ou bouquinistes venus de la Belgique wallonne et flamande, mais aussi de France et des Pays-Bas. Ces «bibliophiles» ont le regard exclusivement tourné vers les étals où s’empilent documents rares ou livres précieux. C’est à peine s’ils prêtent attention à l’étonnante collection d’aéroplanes et d’aéronefs qui occupent le gigantesque espace. Cette spécificité de la foire aux livres de Bruxelles la rend unique au monde : elle se déroule au beau milieu du musée de l’aviation. Ce riche musée avait trouvé refuge il y a un demi-siècle dans les halles de 12.000 mètres carrés construites sous Léopold II pour l’exposition universelle de 1879. Continuer la lecture

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Vivian Maier mania

Un petit cercle percé de trous est placé sur un mur au sein de la vaste rétrospective consacrée à Vivian Maier au Musée du Luxembourg. Et ce n’est pas une photographie. Il ne s’en échappe qu’un son, capturé par l’artiste en 1978, soit une conversation entre deux enfants dont elle s’occupait à Chicago ou encore un extrait d’une discussion avec la grand-mère d’une fillette dont elle avait eu la charge entre 1967 et 1974. Cet enregistrement démontre que cette femme venue à la célébrité par surprise, après sa mort, cherchait d’autres moyens d’attraper ce qui l’intéressait, autrement que par ses appareils photographiques comme un Rolleiflex, un Leica ou ses caméras 8 et 16 millimètres. Ce n’est évidemment pas le clou de l’exposition. Nous sommes là pour admirer les tirages effectués sur le tard par son découvreur John Maloof, portraits, autoportraits et scènes de la vie quotidienne aux États- Unis. Continuer la lecture

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La Chaux-de-Fonds, berceau de l’industrie horlogère suisse et de Le Corbusier

Autant dire que les premiers pas à La Chaux-de-Fonds, perchée à 1000 mètres dans le Jura suisse, peuvent s’avérer déroutants. Ici, ni vieux centre médiéval, ni ravissantes places carte postale, et pas plus de bâtiment contemporain qui en jette. La troisième ville de Suisse romande (38.000 habitants) a été construite selon un plan en damiers avec de larges avenues alignées les unes au-dessus des autres et bordées d’immeubles de taille similaire. Un peu comme une ville américaine mais sans y ressembler ! Continuer la lecture

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Hommages posthumes

Donc, le 4 avril 1791, par un décret-loi de l’Assemblée Constituante, la ci-devant église Sainte-Geneviève, déchristianisée, devint le «Panthéon des Grands Hommes». Le but initial était de récompenser solennellement Mirabeau, pour son rôle dans la chute de l’Ancien régime. Il n’y fera qu’un court séjour. Jusqu’à la découverte de ses rapports stipendiés avec Louis XVI. Il sera alors remplacé par Marat, viré un an plus tard. On relève deux autres expulsés: un certain Picot de Dampierre, général tombé au combat, mais dénoncé par le redoutable Couthon, comme susceptible d’avoir la tentation de passer du côté des émigrés, puis Le Peletier de Saint-Fargeau, déclaré premier martyr de la Révolution et n’ayant pas échappé à la réaction thermidorienne. Postérieurement, plus aucun admis ne sera mis à la porte. Pour Voltaire, aujourd’hui le plus vieux pensionnaire, il s’en fallu d’un rien. Le Panthéon ayant été rendu au culte, en 1806, par Napoléon, des courtisans firent pression sur Louis XVIII pour obtenir son éviction. «Laissez», dit le bon Sire, «il est bien assez puni d’entendre la messe tous les jours !» Continuer la lecture

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Emballé c’est pesé

Les Égyptiens en avaient fait un art mortuaire. Depuis les momies, l’emballage s’est beaucoup diversifié, devenant une industrie à part entière et jusqu’à prévaloir, notamment en parfumerie, sur le produit lui-même. Lorsque l’artiste Christo finalisait en 1985 l’habillement du Pont-Neuf à Paris (photo ci-contre), il perpétuait son propos d’artiste qui était en quelque sorte l’emballage absolu, l’emballage pour l’emballage, l’emballage en soi, avant celui de plaire et d’étonner. Quatre hectares de toile avaient été nécessaires afin de parer de rose le plus vieux pont de la capitale. Pour ce projet à plis qu’il avait financé de sa poche, sans le concours des autorités françaises, il avait réussi à mettre d’accord et Jack Lang, ministre de la culture et Jacques Chirac alors maire de Paris. Disparu au mois de mai 2021, Christo Javacheff (né en 1935) n’aura pas eu le temps de voir l’empaquetage de l’Arc de Triomphe dont l’achèvement est prévu pour le 18 septembre de cette année. Continuer la lecture

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Les 10 ans de la Fondation Villa Datris, sculpture en fête !

Dans le charmant petit village provençal de L’Isle-sur-la-Sorgue, non loin d’Avignon, se niche une fondation d’art contemporain qui n’a rien à envier à des consœurs de plus grande renommée.  Fondée par la femme d’affaires Danièle Kapel-Marcovici, présidente de l’entreprise de fournitures Raja, et son compagnon l’architecte Tristan Fourtine, disparu en 2013, et vouée tout entière à la sculpture contemporaine, la Fondation Villa Datris, a constitué au fil de ses expositions une importante Collection réunissant des sculptrices et des sculpteurs du monde entier. L’exposition qui s’y tient actuellement, “Sculpture en fête”, célèbre aujourd’hui le dixième anniversaire de la Fondation. Reflet et mémoire des expositions passées (1), ce florilège d’œuvres illustre les choix et les goûts de ses fondateurs. Le plus souvent abstraites, les sculptures y sont conceptuelles, cinétiques, mobiles, lumineuses, colorées, numériques… De Niki de Saint-Phalle à Jean-Pierre Raynaud, en passant par Sarah Sze ou Julio Le Parc, ce n’est pas moins de 126 artistes et 156 œuvres qui nous sont présentés, autant dire une belle page de l’histoire de la sculpture contemporaine. Continuer la lecture

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Vertigineuse Lozère

C’est une assez belle façon de découvrir la Lozère, région la moins peuplée de France et l’une des plus belles, que de prendre en été, à Nîmes, «le train des Cévennes» conduisant à Clermont-Ferrand en cinq heures buissonnières. Descendons au bout d’une petite heure à Génolhac, village médiéval situé au pied du Mont Lozère, dans la partie sud du parc national des Cévennes. Après avoir parcouru dans la chaleur estivale les rues étroites bordées de belles maisons de grès anciennes, il faut décider si on montera à l’assaut du glorieux Mont Lozère à pied, en auto, à bicyclette, à cheval ou même en âne, en hommage à l’écrivain voyageur écossais Robert Louis Stevenson, mais nous y reviendrons.
Par mille lacets, nous voilà arrivés au Belvédère des Bouzèdes (ah ces noms lozériens…) et du haut de ses 1236 mètres, l’horizon est immense, désertique, pics, pentes et vallées se succèdent dans un foisonnement de vert et de roc, à peine un hameau ici et là. L’âme même du pays nous est révélée d’un seul coup d’œil. Continuer la lecture

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