Quoi de neuf? Molière!

Jusqu’au 22 mai 2022, à la Comédie Française, se joue « Le Misanthrope », pièce devenue l’une de celles présentées avec le plus de régularité. L’œuvre fut créée le 4 juin 1666. Depuis un an, la troupe de Molière bénéficie de la protection royale. Louis XIV a 28 ans, il règne effectivement depuis la mort de Mazarin, cinq ans auparavant. C’est un jeune homme épris de plaisirs et de fêtes. Sa vie se passe entre le Louvre et Saint-Germain-en-Laye. Versailles ne sera pas accessible avant 1682. Molière, lui, est quadragénaire. Il a épousé, il y a quatre années, Armande Béjart, sa cadette de vingt ans, jeune femme charmante appréciant fort les hommages masculins. Le Misanthrope obéit aux trois unités du théâtre classique : unité de lieu, le scène est à Paris, unité de temps, probablement un après-midi, à l’heure des visites. Unité d’action ? Alceste, accompagné de son ami Philinte, se présente chez Célimène, une jeune veuve parfaitement mondaine, plaisamment médisante, absolument coquette, dont il est amoureux. Continuer la lecture

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Clowns déconseillés aux mineurs

Parents ne vous fiez pas à l’affiche de la Maison du Danemark incitant à une visite au « Royaume des clowns ». Ce n’est pas pour les enfants. Même l’un des deux commissaires d’exposition interrogé, n’a pas bien su justifier le titre de cette scénographie toute récente d’art contemporain, son acolyte évoquant plutôt une « farce perverse ». L’espace « Bicolore », sis au deuxième étage de la Maison du Danemark, est bien dévolu à l’art contemporain et cette exposition sur le « Royaume des clowns », n’a certes pas de quoi faire rigoler des âmes trop jeunes. En témoigne par exemple cette maison-jouet en plastique (Henrik Plenge Jakobsen, 1998) complètement dévoyée de sa destination première puisqu’elle est reliée à une bonbonne de protoxyde d’azote. Le tout étant destiné à « dénoncer l’injonction du bonheur ». Si l’art contemporain nous a depuis longtemps habitués à aller d’étonnement en étonnement, cette exposition ne le trahit pas, en garnissant la grande pièce d’œuvres pour le moins déconcertantes. Continuer la lecture

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Bruits de circulation martiens

Depuis un peu plus d’un an maintenant que l’astromobile Perseverance explore le cratère martien Jezero, la Nasa abreuve quotidiennement les aficionados de l’espace, en images et sons variés. Sur le site dédié au grand public, il est ainsi possible d’entendre les bruits mécaniques (1) du robot exilé et aussi de voir ses traces (ci-contre). Cela n’évoque à dire vrai pas grand chose de supérieur au son d’un vieux caddie de supermarché roulant  sur une route pavée, mais le fait que cela se passe sur Mars, à quelques dizaines de millions de kilomètres, change complètement la donne. Pareil pour le vent local dont le souffle nous envoie de sacrés murmures, bien plus exotiques on l’admettra que la tourmente d’un sèche-cheveux en action dans une salle de bains. C’est ainsi, dans le même ordre d’idées que l’on a pu entendre avec un décalage de 16 minutes environ, le vaillant petit hélicoptère Ingenuity faire ses premiers tours de piste, sa parade martienne, dans une indifférence locale inversement proportionnelle à l’effet produit sur nos oreilles. Continuer la lecture

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Paysans… et écrivains

«ll n’est ni roi, ni duc, ni prince, ni seigneur/Qui ne vive de la peine du pauvre laboureur.» Ces vers signés Émile Guillaumin figurent en bonne place dans la présentation de l’Association des Écrivains et Artistes Paysans (AEAP) qui fête cette année son cinquantième anniversaire. Authentique paysan de l’Allier, Guillaumin (1873-1951) fut sans doute l’un des premiers à concrétiser ses rêves littéraires. L’un de ses ouvrages fut couronné par l’Académie française, et son roman «La vie d’un simple» , qui avait enthousiasmé Octave Mirbeau, obtint plusieurs voix au prix Goncourt de 1904.
Tous les membres de l’association n’ont certes pas connu la même fortune littéraire qu’Emile Guillaumin. Mais chacun, avec sa sensibilité propre, entend témoigner par ses écrits son attachement à la nature, et transmettre au monde citadin les valeurs de la vie terrienne. Continuer la lecture

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Les Vénus du Trocadéro

Celle-là a 17.000 ans et l’artiste qui est en l’auteur, n’a pas cru bon de laisser un petit mot pour en expliquer l’usage ou la destination. Elle se trouve dans une sombre mezzanine du Musée de l’Homme, baptisée et pour cause, salle des trésors. On connaît son âge car jusqu’à 50.000 ans, la datation au carbone 14 fonctionne. Le marquis Paul de Vibraye, qui l’a trouvée en 1864, l’a baptisée « La Vénus impudique ». Sculptée en ivoire de mammouth, c’était la première du genre à faire surface, ce qui fait que par la suite, les autres statuettes féminines ou silhouettes peintes sur des parois, allaient être dénommées des Vénus. Plus globalement, c’est une survivante du paléolithique supérieur, c’est à dire bien longtemps après (3 millions d’années environ) la conception des premiers outils. Cette Vénus n’était pas, selon toute vraisemblance, un ouvre-boîte ou un décapsuleur. Si elle garde tout son mystère, toute cette grâce fragile, c’est tant mieux. Le message qu’elle porte, diffus, magique, n’en est que mieux conservé. Continuer la lecture

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Une adolescence sous l’Allemagne nazie

Les œuvres témoignant du nazisme et de la Shoah, bien que devenues légions, semblent pourtant toujours aussi essentielles car, comme le rappelle Anne Hérold, traductrice et metteuse en scène de “Grandir dans l’Allemagne nazie”, “la bête immonde est toujours tapie dans l’ombre et (…) c’est le rôle de chacun de nous de veiller à ce que la tragédie ne se reproduise pas.” La pièce de l’américain Brendon Votipka, “Face Forward : Growing up in Nazi Germany” (2010), a la singularité de traiter le propos sous le prisme de l’adolescence. Ce parti pris bienvenu est d’autant plus pertinent qu’il ne devrait pas manquer de toucher les jeunes spectateurs, et plus particulièrement ceux de l’âge des protagonistes. En les intéressant à cette période sombre de notre Histoire, le devoir de mémoire n’en a que plus de force. Un spectacle tout aussi nécessaire que réussi. Continuer la lecture

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La nostalgie du samouraï

Jusqu’en 1876, les samouraïs avaient encore le droit de porter le sabre. Mais en l’interdisant, l’époque impériale sous le règne de l’empereur Meiji (1868-1912), mit fin à cette longue période, à partir du 12e siècle, où il était prudent de réfléchir avant de défier ces guerriers japonais dont la légende ne s’est pas éteinte. L’exposition qui vient de s’ouvrir sur ce thème (après un report d’un an) au musée Guimet, nous fait rêver, eu égard à notre époque ou n’importe quel enquiquineur peut nous gâcher la journée. Car on imagine sans peine combien un entretien d’évaluation avec un supérieur prendrait une autre tournure, combien le ton changerait, si le salarié concerné portait un sabre à sa ceinture. Si le respect, le civisme et la courtoisie dans nos villes modernes ont disparu, c’est peut-être au fond qu’il nous manque un katana, non pour le sortir de son étui mais simplement parce qu’il pourrait en sortir. Encore une exposition qui nous offre, outre une leçon d’histoire, un beau motif de méditation. Continuer la lecture

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Rentrons nos blancs moutons

La particularité de cette élégante de 1808, outre son bonnet de tulle, vient de ce qu’elle était vêtue d’une redingote en laine de mérinos, un variant distingué du mouton de base. En France, il est bien connu que nous ne manquons pas d’idées pour nous distraire. Les Archives nationales nous offrent donc en ce moment-même, une exposition sur le mouton mérinos, à ce point complète qu’elle décourage à l’avance tout nouvel événement sur ce thème, du moins à Paris. Ce qui est drôle, c’est qu’elle se terminera le 18 avril avant d’enchaîner le 12 mai sur l’abolition de l’esclavage en 1848. Voilà qui témoigne entre autres choses d’un bel esprit d’à-propos puisqu’il est nous est expliqué que c’est dès le néolithique que l’homme a soumis le mouton, soit pour le manger (ce qui ne peut se faire qu’une fois) soit pour en faire des pullovers ou des redingotes, cette dernière action étant renouvelable après chaque tonte. Le lien avec les Archives Nationales étant que cette administration détient moult documents sur ce thème  depuis 1786, en lien direct avec la bergerie nationale de Rambouillet. Continuer la lecture

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Petite leçon entomologique

Il se passe toujours quelque chose au jardin, surtout quand il s’agit d’un jardin botanique, et surtout quand il s’agit du Jardin botanique des Serres d’Auteuil, l’un des quatre jardins botaniques de la Ville de Paris, et l’un des plus beaux sinon le plus beau. Enfin il était encore plus beau avant que ces messieurs-dames de la Fédération nationale de tennis et de la mairie de Paris ne conjuguent leurs efforts pour l’amputer et le bétonner d’un bon hectare, malgré la bataille homérique des défenseurs du jardin qui a duré près de dix ans. Rappelez-vous, ce n’est pas vieux, cela remonte à 2018. Ironiquement, pour les visiteurs, le seul avantage de la nouvelle situation est l’entrée supplémentaire boulevard d’Auteuil qui s’ajoute aux trois autres, parce qu’elle sert aux spectateurs du tournoi du grand chelem, naturellement. Et qui est naturellement condamnée aux visiteurs lors du tournoi ainsi qu’une bonne partie du jardin pendant près de deux mois, on ne sait d’ailleurs pas pourquoi aussi longtemps alors que le tournoi ne dure que trois semaines. Continuer la lecture

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L’Indien qui sommeille en nous…

“Nous y voilà !” Amer constat d’une planète en décrépitude, d’une nature bafouée par l’homme.  Avec “Nous y voilà !”, la cause environnementale s’invite de façon pour le moins inédite, en textes et en musique, sur la scène de la Comédie des Champs-Élysées. Tout à la fois chant d’amour et cri d’alarme, ce plaidoyer poétique et musical, porté par trois merveilleux artistes et de multiples voix, empruntées aux Indiens d’Amérique comme à nos plus grands poètes, nous engage à reconsidérer notre rapport à la nature. Puissant et magnifique ! Continuer la lecture

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