Ce n’est pas à proprement parler un « grand » film, mais c’est un joli conte de Noël. Sans prétention et non dénué de fond. Le scénario est simple mais pas simpliste. Un couple de retraités se chamaille à longueur de journées pour occuper le temps. Leur fils unique travaille dur pour faire tourner la compagnie d’ambulances qu’il dirige. Ce faisant il délaisse femme et enfants au point de se trouver au bord du divorce. Fortuitement reconstituée pendant l’automne, cette famille à taille réduite mais au cœur géant recueille un garçonnet africain dont la mère sans papiers est menacée d’expulsion. Miracle de la Nativité, ce geste d’humanité leur ouvre les yeux sur leurs propres problèmes.
L’irruption de l’enfant dans ce huis clos parental sert de révélateur au ciment qui lie ses membres, la générosité. Tout se joue dans les regards affectueux ou complices que s’échangent mère et fils, père et fils, et même époux, à la dérobée… Une tendre triangulation qui échappe à ceux qui n’y auront vu que sensiblerie. Drôle, sentimental, c’est un « famille je vous aime » réconfortant par temps de crise.
Le film d’Eric Besnard évite les stéréotypes. La mère en situation irrégulière travaille, parle un français impeccable et s’habille d’élégance. Le jeune ambulancier au bord du burn out ne se cache pas de rentabiliser son entreprise en exploitant la misère humaine. On échappe au cliché, à la facilité.
Josiane Balasko, militante d’un réseau d’assistance à l’écran, n’a pas dû trop se forcer pour passer de l’œil humide à la colère en bandoulière. Don Quichotte en jupon, elle soutient dans la vraie vie les sans papiers et les familles africaines mal logées. Ses emportements filmés sont avant tout dictés par ses deux ventricules. Et quand elle houspille son vieux compagnon de route, elle n’a rien d’une Elisabeth Taylor dans « Qui a peur de Virginia Woolf ».
En robe sans forme, tablier de cuisine et talons plats qui lui confèrent une inimitable démarche de girl scoute, elle porte en héraut l’habit de « casse-couilles ». «J’ai pas dit que c’était un défaut» lui concède-t-on avec un sourire amusé. Comme si elle avait une réputation à conserver.
Gérard Jugnot, son ami depuis plus de trente ans à la ville, lui laisse la vedette, lui servant de quoi rebondir dans les situations et dialogues. C’est bien Balasko la reine du film, un script qu’on imagine transposable au théâtre puisque tout se passe ou presque dans une jolie maison couverte de vigne vierge rousse nichée au cœur de la verdure.
Clovis Cornillac, provisoire Tanguy pour les besoins de la (bonne) cause, a le ton juste pour assurer un minimum de crédibilité au personnage et donner son équilibre à l’équilatéral familial. S’il avait été plus jeune, on eut imaginé Thierry Lhermitte dans le rôle. Mais ce pilier de la bande du Splendid vante désormais les mérites d’un assureur qui pioche à sa guise dans les carnets d’adresses des meilleurs acteurs. Tout en épousant lui aussi une belle cause, celle de la recherche médicale.
Avec « Mes Héros » (on se doute que c’est Clovis qui parle), le Splendid, tel le Phénix, renaît comme chaque année de ses cendres à Noël. Il n’est pas une fête de la Nativité qui fasse l’impasse sur « Le Père Noël est une ordure », film culte de la joyeuse troupe réalisé par Jean-Marie Poiré. Un film dont les jeunes se récitent avec ravissement les dialogues, les vieux les imitant les yeux fermés comme pour s’assurer qu’aucun pan de leur mémoire ne flanche.
Remontant l’avenue des Champs-Elysées à la sortie du cinéma en cette soirée du 24 décembre d’une exceptionnelle douceur, nous vîmes un père Noël juché sur le porte-bagage d’une moto à gyrophare et qui saluait les badauds. Il fit plusieurs fois le tour de la Place de l’Etoile entouré de son groupe de motards pétaradants en tenue de service… Magie de l’événement, même les gendarmes trouvent à s’amuser le soir de Noël !
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