Salvador Dali, actuellement exposé à Beaubourg, raconte qu’un jour des religieux étaient venus le voir afin de savoir pourquoi il avait peint des montres molles. Avec à peu près la même mimique emphatique que pour le chocolat Lanvin, il affirme leur avoir répondu : « parce que Jésus c’est du fromage ! ».
Cela fait partie de ces petites choses amusantes que l’on savoure en découvrant la bande-annonce de la rétrospective Dali à Pompidou. Car les expositions ont désormais leur bande-annonce, oui, parfaitement, comme au cinéma. Et tout comme pour le cinéma, cela permet depuis son bureau, de s’offrir trois minutes récréatives et parfaitement dépaysantes dès lors qu’il s’agit, en l’occurrence, de Dali.
Du reste c’est presque mieux fait qu’une bande-annonce. L’art inspire le réalisateur dirait-on. Le montage ne se résume pas aux seuls moments forts astucieusement choisis comme c’est souvent le cas au cinéma de façon à faire croire que l’œuvre complète sera tout aussi intense que son ersatz. Une bande-annonce est souvent trompeuse et ce n’est pas le cas pour l’exposition vouée à Salvador Dali.
Signée par un certain Zerbit Yoan, l’affaire est bien menée et même joliment mise en musique. Quel bonheur sans doute a-t-il éprouvé à annoncer Dali avec des images du grand masturbateur ou avec celles des larmes de Gala, l’épouse du peintre.
Il ne s’agit pas d’un coup d’essai puisqu’en poussant son nom sur Google on s’aperçoit qu’il avait déjà co-réalisé une affaire similaire lorsque c’était Mondrian qui créait l’événement à Beaubourg. Et là encore, aidé par une matière créative pouvant aussi générer de l’inspiration, le résultat est plaisant avec une musique extra à base de matière jazzy.
Bon système que ces avant-goûts filmés car lorsqu’il s’agit d’une exposition en cours, cela permet d’en tâter un bout et d’éprouver l’envie d’y aller. Et quand cela relève d’un événement forclos comme Mondrian, l’on se sent autorisé à en reprendre un peu. Et encore.
Et celle sur Mondrian, épatante.
A propos des montres molles évoquées dans votre article Salvador DALI Bande annonce, notre cher Salvador raconte :
« Cela se passa un soir de fatigue. J’avais une migraine, malaise extrêmement rare chez moi…Nous avions terminé notre diner avec un excellent camembert et, lorsque je fus seul, je restai un moment accoudé à la table, réfléchissant aux problèmes posés par le « super mou » de ce fromage coulant. Je me levai et me rendis dans mon atelier pour donner , selon mon habitude , un dernier coup d’oeil à mon travail. Le tableau que j’étais en train de peindre représentait un paysage des environs de port Lligat dont les rochers semblaient éclairés par une lumière transparente de fin de jour. Au premier plan, j’avais esquissé un olivier coupé et sans feuilles. Ce paysage devait servir de toile de fond à quelque idée, mais laquelle ? Il me fallait une image surprenante et je n’en trouvais pas. J’allais éteindre la lumière et sortir, lorsque je « vis » littéralement la solution : 2 montres molles dont l’une pendrait lamentablement à la branche de l’olivier » (la vie secrète de Salvador Dali) – Paris 1952).
La fascination du peintre pour le « super mou » se retrouve dans nombre de ses oeuvres où la terreur de la mort se mêle au cauchemar de l’impuissance.
Longue vie au soirée de Paris