Une femme seule en scène, qui nous ouvre les portes de son palais vénitien. Mais quelle femme ! Peggy Guggenheim, la célébrissime mécène, « femme face à son miroir » nous précise le titre de la pièce, car la confession aux visiteurs d’un soir au Théâtre Michel est un autoportrait, un monologue retraçant une vie d’errances entre New York, Paris et Venise notamment, une vie aux mille aventures, bousculée par la Seconde guerre mondiale.
Le spectacle, adapté d’une pièce américaine de 2005 et créé en France l’an passé au Théâtre de la Huchette, a de quoi rassembler amateurs de planches et d’encadrements. Pour l’amour de l’art. La comédienne Stéphanie Bataille nous entraîne avec conviction du rire aux larmes dans la peau d’une bienfaitrice de l’art moderne qui révèle ses failles intimes. La mise en scène de Christophe Lidon habille habilement la scène pour nous présenter le cocon que représentaient les œuvres de la collection pour la richissime américaine, ses « bébés ».
Soit donc une femme à l’âge du bilan, qui attend le président de la République italien qui comme tant de prétendants se disputent la collection. Une collection digne de la Sérénissime, bâtie par une autodidacte accro à l’«art vivant», qui a pu se permettre tous les excès. Mais ce travail d’une vie n’a «rien à voir avec le profit puisque cela ne valait rien» au moment de l’achat plaide la mécène.
Peggy Guggenheim nous présente le film de sa vie, passe de l’auto-glorification à l’auto-flagellation. Elle parle de ses protégés, Vassily Kandinsky, Paul Klee, Yves Tanguy parmi tant d’autres, de ses amants, ses deux enfants, sa famille, de son père disparu avec le Titanic à la famille new-yorkaise, à qui elle cèdera finalement sa collection sur la promesse que tout restera intact dans le palais vénitien au sein duquel le musée Peggy Guggenheim continue d’attirer les foules au bord du Grand Canal.