La rumeur a glissé tout le long de la rue du Faubourg Poissonnière, a légèrement viré devant le cinéma Rex avant de gagner la rue du Sentier : chez Albion tout est bon. Ce que l’on mange chez ce britannique a tout d’un médicament libérant plusieurs principes actifs dans un ordre savant et… succulent.
Le midi il faut une bonne santé pour boire du vin ou rien avoir à faire l’après-midi. C’est dommage parce que chez Albion la cave a l’air bonne. Les anglais étant de bons connaisseurs, cela n’a rien de surprenant. On pourrait aussi le déduire du seul petit chardonnay du Cantal que nous avons goûté, s’en convaincre devant les étalages de bouteilles à emporter, ou encore en considérant la cave et ses réserves par les deux fenêtres fixées à même le sol du restaurant. On essaiera avec confiance cet aspect liquide des choses un autre jour.
En attendant, le récit de ce parcours sans faute daté du 17 octobre, peut commencer par le velouté de champignons de Paris au gouda. Le plumage valait le ramage, on aurait dit un petit tableau. Quant au boudin noir de Christian Parra avec son maïs et ses topinambours, il faudrait s’arrêter de parler pour le déguster vraiment, ce qui là encore nous obligera à une nouvelle visite. C’était en tout cas assemblé avec goût, avec une préméditation évidente, que ce soit pour les yeux ou les papilles. A vrai dire le plaisir de voir y valait le plaisir du manger. A s’y perdre ou s’y retrouver.
Les deux plats principaux retenus se distinguaient par la cuisson parfaite du filet de barbue d’un côté et du filet de cabillaud de l’autre. Mais le stratagème du chef tenait dans l’accompagnement. Une œuvre faite de plaisirs stratifiés nous a saisis à fond de poêle. Et dans ces fameuses strates l’on trouvait du chou vert, des champignons à la crème, de la poitrine et des (divinement fines) palourdes pour la barbue. Tandis que le cabillaud était finement accompagné de blettes, de sauce pommes granny, de chutney épicé et de noix. Dans les deux cas le chef méritait haut la main les félicitations d’un jury qui s’est régalé.
Il y avait de quoi nous inciter à prendre des desserts quitte à s’astreindre à un footing matinal le lendemain matin pour brûler des calories. Ah vous chanterai-je ces fraises de bois Marat (ah bon c’était un amateur de fraises, le Marat qui finira assez justement poignardé dans son bain?), avec lait ribot, estragon et basilic… Ah et comment raconter comme il le faudrait vraiment cette mousse de potimarron lovée sur une autre mousse de chocolat avec au moins quatre nuances franches et quelques quartiers d’orange? Il semble que la réponse soit dans l’intitulé de la question.
Conseil à ceux que nous aurions convaincus : allez-y en prenant votre temps. Pour tout ce qui écrit au-dessus, comptez 88 euros. Précision: Les Soirées ne se font pas inviter par les restaurateurs.
80 rue du Faubourg Poissonnière 75010 Paris
01 42 46 02 44
It sounds great