Helmut Newton, voyeur professionnel

Luxe, classe et volupté, tel pourrait être l’adage de la femme newtonienne qui fait l’objet, au Grand Palais, de la première rétrospective* du photographe en France, depuis sa mort en 2004. Le regard sur les femmes du photographe de mode Helmut Newton -qui a notamment travaillé sur l’édition française de Vogue- relève du fantasme, comme en témoignent les nombreux tirages originaux ou «vintage» de l’exposition.

Newton ne s’intéresse pas à celles que l’on croise tous les jours dans la rue mais à celles qui ont de l’argent, beaucoup d’argent, et qui sont infiniment belles et puissantes. Leur beauté n’est jamais pure, innocente, elle est hors-norme, les plaçant d’emblée dans le rôle de dominatrices. Ces femmes – le plus souvent des mannequins nues en talons aiguille – s’assument, s’affichent, s’exhibent dans des postures osées, sulfureuses, et érotiques.

Yves Saint Laurent, Vogue France, Rue Aubriot, Paris 1975 © Helmut Newton Estate

 

Au bord de la piscine, sur le sable, dans une salle réfrigérée, dans un salon bourgeois, dans l’avenue Kléber ou George V… «Le mannequin n’est pas une femme, c’est une idée avec laquelle joue le photographe comme le jongleur avec ses quilles, les disposant selon sa fantaisie», disait Newton. L’artiste aime le choc des images, les éclaboussures. La femme a priori bien sous tout rapport -tailleur cintré et colliers de perles- a forcément des vices : elle boit, fume, provoque, séduit, est ouverte à tous les fantasmes…  La salle «du voyeur» est trash, affichant des photos de prostituées et leurs clients et des scènes sadomaso.

«J’adore la vulgarité. Je suis très attiré par le mauvais goût, plus excitant que le prétendu bon goût qui n’est que la normalisation du regard», confiait Newton en 1984.

Ailleurs, des femmes (nues) blessées semblent tout droit sorties du film Crash de Cronenberg qui associe souffrance et pulsions sexuelles. Elles sont abîmées, parfois dangereuses, ou en danger, croquées par un crocodile ou  cernées par un gros berger allemand.

En guise de bouquet final, le gros plan sur les mains d’une femme (riche) déchiquetant, au couteau tranchant, un poulet mort, qui montre son croupion obscène, laisse une image de l’univers d’Helmut Newton, crue, et malgré tout fascinante.

* Prolongation jusqu’au 30 juillet 2012

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