«Speak in english» souligne à deux reprises le numéro un d’une banque américaine à un de ses salariés spécialisés dans l’analyse des risques. Parlez-moi comme si vous parliez à enfant où à un Labrador, insiste-t-il en substance. Le jeune cadre s’exécute et quelques minutes plus tard son patron comprend que son établissement centenaire va disparaître s’il ne se débarrasse au plus vite de ses produits financiers complexes. Voilà pour l’intrigue du film «Margin Call», réalisé par JC Chandor et depuis peu dans les salles.
La grosse crise qui a ébranlé le monde de la finance avec le piège des crédits à gogo pour gogos et la chute de la banque Lehman Brothers, n’a pu qu’attiser la créativité des scénaristes. Pour Margin Call, le script du film a été rédigé en quelques jours et la réalisation s’est effectuée avec des moyens très limités. Une réussite si l’on veut bien passer sur quelques imperfections à vrai dire marginales.
Toute l’action ou presque se situe dans les locaux que l’on peut supposer d’une banque et singulièrement de son département d’analyse des risques. Le chef de ce département est licencié le jour où il s’apprêtait à mettre en évidence que l’établissement qui l’emploie est passé de l’autre côté des modèles de sécurité qui permettent de se couvrir tant qu’ils sont respectés. L’un de ses adjoints prend alors le relais et alerte ses supérieurs sur la proximité d’une catastrophe.
Tout cela est très bien vu. Après la faillite de Lehman Brothers en septembre 2008, beaucoup de directeurs de banque à travers le monde se souviendront toute leur vie, seconde par seconde, minute par minute et heure par heure, de la journée qu’ils ont alors vécue. La reconstitution de cette tension est très bien rendue. Rien n’y manque, la cupidité, le cynisme, l’aveuglement et surtout les produits financiers dit structurés dont peu de professionnels connaissaient les subtilités de la notice et qu’ils vendaient pourtant en blocs, sans sourciller.
Le film se divise en deux séquences majeures. L’une est nocturne, c’est le moment où un petit groupe d’individus prend conscience de l’ampleur d’un problème interne qui n’est que l’ébauche d’un cataclysme à l‘échelle planétaire. La deuxième séquence est diurne. Les traders sont réunis dans la salle de marché avec pour mission de se débarrasser dans la journée des produits toxiques dont leur société s’est imprudemment gavée. Ils sont un petit groupe de vendeurs qui se voient promettre à l’aube deux fois 1,3 million de dollars chacun en cas de succès. Et ils y arrivent. L’histoire fait que dans la réalité, certains ont dû agir en catastrophe et d’autres avec un sens de l’anticipation qui les ont fait passer pour des cadors.
Le réalisateur nous intègre sans problèmes, nous spectateurs, dans ce quasi huis clos où chacun tente de sauver sa peau. Quand vient l’aube sur Manhattan, on se sent les yeux cernés et les mains moites alors même que l’on regarde le film en plein après-midi. Le film est vite fait bien fait au risque de déceler çà et là quelques longueurs ou minutes bâclées.
A chaque fois qu’un trader réussit à placer dans l’urgence l’un de ses produits pourris, son interlocuteur lui répond «done» pour approuver la transaction. Alors on pourrait dire du film Margin Call (1) qu’il est «well done». I do speak english.
(1) Pour rester dans le cinéma, la notion d’appel de marge est assez bien définie dans le film «Le Sucre». Si l’on spécule sur 100 en misant dix on peut être amené à payer la dépréciation de sa position. Si on n’en a pas les moyens, les problèmes commencent.
Des milliers de milliards d’euros pour sauver les banques en 2008 – 2009,
700 milliards de fonds d’aide européens,
130 milliards pour la dernière tranche d’aide à la Grèce,
300 milliards de dette grecque,
1000 milliards d’euros donnés aux banques par la Banque centrale européenne et combien de réinjectés dans la vie réelle?
D’où vient tout ce blé, cette thune, ce fric, l’artiche, le grisby, il suffit de taper « bonus » sur Google pour voir que certains savent où le trouver.
Il suffit de taper « appauvrissement » sur le Net, pour voir que d’autres non.
Et quand on tape « fin du monde » ?
Espérons que l’on trouve fin d’un monde…
(Pas encore vu le film mais en bonus Kevin Spacey et Jeremy Irons… J’y cours!)
Le sucre avait plus de sel