C’est l’histoire d’un homme ou d’une femme, on ne sait pas faute de signature, qui se baladait dans une rue du 10e arrondissement, peut-être la rue Bichat, et qui, outré de la virginité d’un mur anciennement ravalé par une peinture trop terne a écrit au pinceau : «Et le bleu de Prusse alors ?».
Soit il se promenait juste au cas où avec un seau plein de bleu de Prusse soit il est rentré chez lui au petit trot pour récupérer du matériel et tracer la question en grand sur ce mur fraîchement repeint donc. On peut supposer «qu’il» a poussé ensuite jusqu’au canal Saint-Martin, car sur la guérite du pont-levant il a peint une spirale bleu de Prusse. Déduction purement arbitraire mais enfin l’hypothèse que deux militants du bleu de Prusse s’activaient ce jour-là dans le même quartier est quand même improbable (1).
Il fallait aussi que son seau fût prêt car pour obtenir un bleu de Prusse ou bleu berlinois, il faut mélanger «en solution dans l’eau 6 parts de sulfate ferreux et six parts de ferrocyanure de potassium, on y ajoute 24 parts d’acide chlorhydrique et 1 part d’acide sulfurique. Au bout de plusieurs heures on verse dans la préparation du chlorure de chaux. Le Bleu de Prusse précipite au fond du récipient. Il ne reste qu’à le purifier du ferricyanure de potassium qu’il contient en faisant précipiter ce dernier par l’action d’un peu de chlorure ferrique dilué. Le Bleu de Prusse peut être alors séché» dixit Wikipédia.
Il se trouve en plus que ce fameux bleu de Prusse a la faculté d’éliminer le césium 137 du corps humain si l’on s’en réfère à un article notamment paru dans myeurop.info.
Si l’on résume, le ravalement efface tout. Le bleu de Prusse permet d’outrager joliment l’uniformité éradicatrice et, le cas échéant, d’évacuer le césium 137. C’est rien de le dire mais, comme le rappellent régulièrement Les Soirées de Paris, les murs de la capitale sont tapissés de messages à usages variables.
Pour conclure ce courrier du street-art, nous hésitons à parler de ce collage qui tient depuis de nombreux mois (à la date où nous publions) dans la rue des Jeuneurs sans avoir été repéré par les brigades anti-graffiti. Sans doute que les habitants du quartier s’y sont faits et n’ont pas appelé le numéro spécial qui déclenche le ravalement actuel, couleur beige. D’autant que le militant (ou la militante) du bleu prussien se tient sans doute prêt à intervenir pour combler le vide.
(1) La spirale couleur bleu de Prusse a été vue dans d’autres endroits de Paris, notamment près du Louvre.
Une jolie activité que voilà, qui rappelle à propos le « travailler pour le Roi de Prusse », expression que l’on n’entend plus guère.
Je comprend donc pourquoi au-delà de la ligne bleue des Vosges, la Prusse et quelques Etats environnants veulent la fin du nucléaire. Ben quoi, si le bleu de Prusse bouffe le césium 135!
Enfin bref, pour éviter une nuit bleue, faut faire gaffe à l’acide sulfurique, votre passion pour le street art peut vous faire de grosses chaleurs mal venues, surtout en contact avec l’eau.
Cela dit, vive le street art (avec Valentine?)
– Quoi? Mais non Valentine ce n’est pas ma copine, je la trouve à Bricorama.
– Mais non , elle bosse pas à Bricorama. Y’en a qui comprennent rien..
Quelle bonne idée des Soirées de Paris de consacrer un article au street-art ! Que ce soit au pinceau, à la bombe (inoffensive bien sûr) ou à la craie. On redemande de semblables illustrations commentées de cet art spontané… A vos plumes !
Article vivifiant et sympa !
Ah ! J’oubliais, la rue des jeûneurs se nommait autrefois rue des jeux-neufs…
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