À part la piste Benalla, on peut dire que Florence de Changy a à peu près tout exploré avant de se faire une conviction. Dans la réédition augmentée de son enquête qui vient de paraître, cette journaliste correspondante du Monde et de RFI a en effet passé au peigne fin toutes les hypothèses, de la plus simple aux plus mirobolantes. Son travail autour de la disparition en mars 2014 du Boeing 777 de la la Malaysia Airlines, se lit comme un roman, le roman de tous les mensonges. Selon elle, « lorsqu’il existe plusieurs explications possibles à un problème, celle qui exige le moins d’hypothèses nouvelles et qui cadre le mieux avec ce que l’on sait déjà de situations semblables est généralement la bonne ». Une idée écrit-elle, rejoignant le principe américain KISS (keep it simple stupid), lequel privilégie un scénario basé sur une bête catastrophe à bord mais d’une telle ampleur que l’appareil se serait volatilisé. Tout le reste ne serait, avec cette approche, qu’une somme de nœuds ineptes agrégés dans nos cerveaux fertiles.
Sauf que rien ne colle aux yeux de l’enquêtrice pour expliquer comment, l’un des avions les plus sûrs du monde, a tout bonnement disparu des radars civils emportant ad patres 239 passagers qui croyaient pouvoir arriver sans encombre à Pékin (Chine) depuis Kuala Lumpur (Malaisie). Le coin avait beau être truffé de systèmes de détection, y compris deux Awacs, le gros aéronef a disparu. A-t-on voulu le faire disparaître? Florence de Changy livre à ce propos un principe de base que tous les prestidigitateurs amateurs connaissent bien. Pour faire disparaître quelque chose, lors d’un tour de magie, il faut créer une diversion, attirer l’attention des spectateurs ailleurs que la main qui subtilise adroitement l’objet.
C’est l’aspect, si l’on peut dire, parfaitement réussi de ce drame. Les leurres sont multiples. La journaliste en fait la démonstration implacable sans perdre de vue les victimes et conséquemment, son enquête ne vise pas tant à distraire qu’à dénoncer l’immense intoxication qui a presque aussitôt prévalu. Le premier des bobards d’après elle, est d’avoir entretenu l’idée que l’avion aurait changé d’itinéraire avec des passagers et un équipage devenu inconscients, avant de se perdre dans les mers du sud une fois les réserves de carburant consommées. Et les médias ont marché tête baissée. La découverte triomphale d’un bout d’avion retrouvé sur une plage de l’île de la Réunion en a été le point d’orgue. Un débris n’ayant en fin de compte rien de probant mais qui arrangeait tout le monde. Rien n’est meilleur qu’une bonne histoire, souligne-t-elle en substance. La vérité compte parmi les victimes du drame.
Florence de Changy a cependant relevé des dizaines d’incohérences formant autant de fables et d’os à ronger que de fausses pistes à suivre. Elle s’est notamment concentrée sur le chargement. Selon la liste disponible des paquets et autres containers, la soute était garnie de mangoustans (des fruits dont ce n’était pas la saison) et du matériel électronique à la description approximative. De quoi, dans le détail, éveiller la suspicion de l’auteur qui en bonne journaliste, s’est évertuée à évacuer tout ce qui paraissait trop beau ou trop simple pour être vrai.
C’est rien de dire qu’elle nous fait participer à son enquête. C’est peu d’écrire qu’elle nous laisse plus d’une fois abasourdis par l’enfumage généralisé d’à peu près tous les intervenants officiels ayant accès à un micro. Toutes ces années de travail acharnées, probablement obsédantes, l’ont finalement amenée à bâtir une hypothèse. À partir d’une cargaison qui pour un motif non encore élucidé ne devait pas arriver à Pékin et d’un plan « A » qui n’a pas fonctionné comme prévu. Sous sa plume, le plan « A » est attribué aux américains qui auraient décidé de détourner l’avion de son plan de vol. Mais le pilote du MH370 n’aurait pas obéi aux injonctions des intercepteurs avant d’aller se crasher sous l’effet de quelque chose, quelque part sur les côtes vietnamiennes. Toute la zone du crash aurait ensuite été nettoyée. Et l’ensemble de cette histoire tragique aurait par la suite fait l’objet d’un pacte secret entre les États concernés, principalement la Chine et les États Unis. Pacte qui tiendrait toujours.
Quand l’information n’était pas encore verrouillée explique-t-elle, il y a eu des déclarations troublantes. D’abord celle de l’ambassadeur de Chine venu dire sans ambages aux familles: « C’est très compliqué, vous ne pouvez pas comprendre. » Et Florence de Changy se remémore par ailleurs qu’en 2016, elle avait rencontré un des membres d’une famille éplorée. Lequel se souvenait des propos d’un militaire malaisien à l’adresse des familles: « Nous savons des choses que nous ne pouvons pas vous dire. » La communication (le mot moderne pour « intoxication ») a ensuite pris le relais.
Le travail de Florence de Changy a été fort justement salué par la critique. On oserait presque lui suggérer de s’intéresser au virus qui nous tourmente, vu que là aussi, le fumet du mystère nous chatouille les narines.
PHB
« Vol MH 370 La disparition » Florence de Changy, éditions Les Arènes 24,80 euros, volume revu et augmenté (2016-2021)
Un enfant de cinq ans, quand il fait un gros mensonge, donne plein de détails précis pour l’étayer. Sans se rendre compte que les adultes savent quand même plus de choses que lui et vont rapidement démonter le stratagème. L’enfant ne connaît pas le principe KISS.
Les politiques, les militaires ne font pas autre chose et, la plupart des journalistes, sauf ici Florence de Changy, ne se donnent pas la peine de faire l’enquête pour démonter les « hénaurmes » bobards.
Pour le covid, les 515 pages du livre de Florence de Changy n’y suffiront pas !
Pour Benalla, 200 pages devraient suffire.
Je me souvenais très bien de cette affaire de 2014 et je reconnais qu’au fond de moi,j’étais resté profondément sceptique sur cette explication des autorités amplifiée par les médias d’une disparition d’un avion de ligne à notre époque pleine de radars et de satellites.Et j’en voulais aux médias de gober sans discussion cette thèse officielle.
Et grace soit rendue à Fl. de Changy qui fait table rase de tous ces mensonges et au terme d’une très longue enquête,écarte peu à peu tous les faux semblants pour aboutir à une hypothèse assez plausible qui met la pression sur un prix nobel de la paix et ses adjoints!
Quoi qu’il en soit,beaucoup de gens savent la vérité et un jour,certains parleront. D’autant que plusieurs pays y ont été mêlés ,à savoir le Vietnam en premier lieu et la Malaisie,et la Chine bien sur avec les USA.
En résumé,un livre absolument passionnant.
Ghislain, ancien haut dirigeant chez Lafarge, doit rejoindre sa femme et ses enfants pour des vacances en Chine. Arrivé à Pékin, on lui apprend que leur avion, le vol MH370 en provenance de Malaisie, a disparu en plein océan.
Son témoignage dans l’émission de France Culture « Les pieds sur terre » est saisissant.
Il est d’ailleurs cité dans le livre. PHB