Le 14 juin prochain paraîtront simultanément aux éditions Glénat les Tomes 5 respectifs des trois cycles des Mystères de la République “Les Mystères de la troisième République”, “Les Mystères de la quatrième République” et “Les Mystères de la cinquième République”, clôturant ainsi trois cycles d’intrigues et d’histoires politiques passionnantes.
A l’origine et au scénario de ces trois séries de bandes dessinées, un homme : Philippe Richelle. Né en 1964, diplômé en Sciences Politiques de l’Université de Liège, Philippe Richelle conjugue avec talent, dans une œuvre déjà conséquente, l’Histoire, la politique et le polar, ses trois passions apparemment.
Avec la série policière “Les Coulisses du Pouvoir”, il explore déjà avec réalisme les rouages de la politique. Dans “Amours Fragiles”, il entreprend une grande fresque historico-romanesque qui raconte le deuxième conflit mondial depuis l’avènement du nazisme jusqu’à sa chute. Avec “Opération Vent Printanier”, il évoque la rafle du Vel’d’Hiv. Puis en 2006, il se lance dans la série “Secrets Bancaires”, composée de huit albums, dans laquelle il explore les dessous noirs de la finance. Le succès étant là encore au rendez-vous, il entame un second cycle “Secrets Bancaires USA”. En 2015, il publie un roman graphique unanimement salué par la critique “Mitterrand, un jeune homme de droite”.
Avec “Les Mystères de la République”, il revisite, à travers des intrigues policières, l’histoire de la France des années 30 à nos jours, en s’inspirant de faits réels. Illustrée avec talent par différents dessinateurs – Pierre Wachs pour la IIIème République, Alfo Buscaglia pour la IVème et François Ravard pour la Vème –, la série est devenue un best-seller et ses aficionados attendent les derniers tomes avec impatience, en espérant secrètement bien évidemment que ce ne soient pas les derniers, mais juste les suivants.
“Les démons des années 30”, “Le tueur dévot”, “Complot fasciste” et “Le sang d’un ami” composent, jusqu’à ce jour, la série des « Mystères de la troisième République ». Le commissaire Franck Perettti, son adjoint l’inspecteur Perrier, ainsi que toute son équipe sont confrontés à diverses enquêtes se déroulant sur différentes années : l’assassinat du directeur d’un journal antirépublicain “La Vérité” dont les articles sulfureux ont brisé de nombreuses carrières politiques (1937), la noyade plus qu’étrange du Ministre de l’Intérieur de l’époque rappelant à s’y méprendre l’affaire Roger Salengro (fin 1936), les activités très douteuses d’une organisation d’extrême droite (fin 1937) et un règlement de compte lié au très fructueux marché noir qui s’est installé pendant l’occupation (1942). Chaque enquête, avec une bonne dose de suspense et un rythme très soutenu, dévoile les dessous troubles de la politique, révélant de sordides associations et des secrets que de nombreux politiciens gagneraient à garder enfouis.
L’auteur nous dépeint une France malade de ses institutions qui voit monter en puissance l’idéologie fasciste, annonciatrice du désordre mondial à venir. La naissance du parti communiste, le régime de Vichy, la collaboration avec l’ennemi, la résistance… autant de thèmes traités avec intelligence et érudition. Le dessin précis et réaliste de Pierre Wachs joue pour moitié dans la qualité de cette bande dessinée. Il fait revivre à merveille le Paris de l’entre-deux-guerres. Ainsi The Bookworm – Librairie américaine dans laquelle Hemingway dédicace son livre “Mort dans l’après-midi” (Death in the Afternoon, 1932), tenue par une certaine Sylvia Finch, et La Maison des Livres juste en face dirigée, elle, par Claire Morel, l’amie du commissaire Peretti, rappellent-elles furieusement la célèbre librairie américaine Shakespeare and Company de Sylvia Beach et La Maison des Amis des Livres d’Adrienne Monnier, sa compagne, rue de l’Odéon. Le clin d’œil est amusant et la reconstitution en images très ressemblante. On se croirait dans le “Paris est une fête” du grand Ernest. A l’évidence, Pierre Wachs s’est tout autant documenté que Philippe Richelle pour faire renaître cette époque. Le moindre détail est étudié et dessiné avec minutie et l’on retrouve par exemple avec amusement, à l’arrière plan, des affiches de cinéma de films tels que “L’Ange bleu” ou “La Bête humaine”.
“Les résistants de septembre”, “Marseille la Rouge”, “Le bel automne des collabos” et “La Main rouge” composent, jusqu’à ce jour également, la série des Mystères de la quatrième République. Les deux premiers tomes se déroulent dans le sud de la France où opère le commissaire Serge Coste assisté du fidèle Hautcoeur. Un charnier mis à jour dans un village du Lubéron en 1946, l’assassinat d’un agent de la DST au printemps 1950 et dans le même temps la grève des dockers, le meurtre en 1953 d’un homme de lettres ancien résistant et ex-membre du parti communiste et, en 1956, le soi-disant suicide d’un journaliste qui avait pour projet d’écrire un livre sur les mouvements pro-colonialistes en Afrique du Nord sont les nouvelles intrigues de cette autre série. L’épuration, les milieux de la collaboration avec les miliciens et les auxiliaires de la Gestapo, l’utilisation des syndicats à des fins politiques par les différents blocs de la guerre froide à peine instaurée, le début de la décolonisation sont quelques uns des sujets abordés ici de façon là encore très documentée et savamment scénarisée. La guerre est encore proche et il est difficile de l’oublier. Les plaies de l’occupation ne sont pas encore cicatrisées. Le dessin de Buscaglia n’envie en rien celui de Wachs. Dans le même style réaliste et minutieux, il est tout aussi réussi.
“Les Mystères de la cinquième République”, avec “Trésor de guerre”, “Octobre noir”, “Les larmes d’Alger” et “L’Ombre du SAC”, traitent essentiellement des événements d’Algérie avec pour enquêteur cette fois-ci le commissaire Paul Verne.
Cette trilogie historique ambitieuse est décidément de la belle ouvrage. Merveilleusement documentée, intelligemment scénarisée et très joliment dessinée, il n’y a rien à redire. Le suspense toujours au rendez-vous, le rythme sans relâche, des protagonistes attachants, il serait agréable de pouvoir revoir toute l’Histoire de France de la sorte. A la grande Histoire se mêlent aussi la vie des héros de la PJ qui, très impliqués dans leurs enquêtes, se retrouvent parfois personnellement touchés à travers un membre de leur famille (une compagne, un fils, un père), ce qui ne fait qu’ajouter de l’émotion au suspense.
Une série à suivre donc. Rendez-vous en juin.
Isabelle Fauvel
A paraître aux éditions Glénat le 14.06.2017 :
“Les Mystères de la troisième République” Tome 5 : “Mort d’un collabo”
“Les Mystères de la quatrième République” Tome 5 : “Opération Résurrection”
“Les Mystères de la cinquième République” Tome 5 : “Au nom de la France”