Des livres, des livres sur Apollinaire en attendant la fête

"Dessins apollinariens" de Madeleine Ravary. Photo: PHB/LSDPC’est un nouvel ouvrage tout en inspiration et délicatesse que vient de signer Madeleine Ravary autour des Mamelles de Tirésias. Cette pièce de théâtre a été jouée pour la première fois à Montmartre en juin 1917.  Quoique mince, ce livre est très riche puisqu’il contient le texte original d’Apollinaire, des œuvres du peintre Serge Férat (à l’époque co-directeur des Soirées de Paris) réalisées pour la pièce en question, un remarquable texte d’accompagnement de Peter Read et enfin des illustrations fidèles à l’esprit de la pièce, colorées et sensibles, signées de l’artiste qu’est Madeleine Ravary. Pour un apollinarien, ce livre justement titré « Dessins apollinariens », paru aux éditions Calliopées, constitue un délectable entremets.

Il a déjà été question dans Les Soirées de Paris de cette pièce à la créativité ébouriffante, drôle, loufoque et brillante, élaborée autour de l’urgence quelque peu baroque de faire des enfants toute affaire cessante (1).

Dans une préface, Peter Read nous explique avec drôlerie, érudition et brio, dans quel contexte s’est pour la première fois jouée la pièce « Les mamelles de Tirésias » le dimanche 24 juin 1917 au Conservatoire Renée Maubel sur les hauteurs de la rue Lepic.

Peter Read laisse deviner l’étonnement probable des habitants de Montmartre regardant incrédules le monde artistique parisien grimpant la butte pour assister à la représentation. Max Jacob, Juan Gris, Diego Rivera, Foujita, Paul Poiret, Louis Aragon, Philippe Soupault, André Breton et bien d’autres encore ont fait le déplacement jusque dans la salle qui déborde.  A ce propos, Peter Read cite judicieusement Cocteau qui a dit plus tard « on s’y entassait comme les ingrédients d’une bombe« . Le programme, rappelle encore le préfacier, était orné de dessins de Picasso et de Matisse.

Détail d'une illustration de Madeline Ravary pour son livre. Photo: PHB/LSDP

Détail d’une illustration de Madeleine Ravary pour son livre. Photo: PHB/LSDP

Madeleine Ravary a déjà illustré des textes d’Apollinaire dans un livre notamment complété de traductions en idéogrammes chinois(2). Elle profite de ce deuxième opus pour remettre en avant Serge Férat, un peintre cubiste, auteur de la plupart des costumes et du décor des Mamelles de Tirésias. Avec la baronne d’Oettingen (ci-contre), il a soutenu financièrement Les Soirées de Paris, qu’il codirigeait avec son ami Apollinaire.

Autour du poète, critique, journaliste, écrivain, artiste, la pression monte. Une exposition lui est en effet consacrée à l’Orangerie à partir du 6 avril, concomitamment à une autre manifestation sur le Douanier Rousseau (l’un de ses amis) au musée d’Orsay.

On a vu récemment dans Les Soirées de Paris qu’un livre était sorti sur la correspondance générale de l’écrivain(3). S’y ajoutera sous réserve d’inventaire ultérieur, la correspondance du galeriste Paul Guillaume avec Apollinaire (par Peter Read et Laurence Campa, chez Gallimard/Musée d’Orsay et dont nous aurons l’occasion de reparler) et sans compter une étude pour le moins cérébrale d’Alcools signée Laurent Fourcaut chez Calliopées.

Il nous est également promis un beau catalogue dont Les Soirées de Paris ont pu avoir un aperçu prometteur: un « must have » comme l’on dit de nos jours. Il ne manquerait plus qu’une messe baroque à Saint-Thomas-d’Aquin où Apollinaire se marie en janvier 1918 avant que l’on y célèbre, quelques mois plus tard, ses obsèques. Une fête à l’Orangerie c’est déjà mieux que pas mal.

PHB

(1) L’article sur les « Mamelles de Tirésias » paru dans Les Soirées de Paris à l’occasion de la représentation en opéra-bouffe signé Poulenc à l’Opéra Comique.

(2) L’article sur le premier livre signé Madeleine Ravary.

(3) L’article de Gérard Goutierre sur la correspondance générale de l’écrivain.

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