Sur le fond il vaut mieux être libre qu’encarté. Ne dit-on pas d’ailleurs « détention » d’une carte de presse. Mais voilà que cette semaine deux noms de la radio se sont émus du même sujet. D’une part la journaliste Pascale Clark qui, s’étant vu refuser le renouvellement de sa carte presse, a protesté en coupant le micro de son émission pour la remplacer par de la musique en continu. D’autre part, son confrère du même groupe Patrick Cohen, a coupé la sienne en deux en direct avant de la jeter à la poubelle. Par énervement.
Leur courroux est compréhensible. Cette carte est un outil de travail qui permet, plus sûrement qu’un titre d’abonné au gaz, de s’accréditer afin de couvrir l’actualité quelle qu’elle soit. Les critères d’attribution de cette carte sont simples et il n’est pas ici question de dénoncer le travail de la Commission. Il faut lui démontrer que plus de la moitié des revenus du demandeur sont issus d’un travail journalistique et que cette rémunération provient d’un organe de presse disposant d’un numéro de commission paritaire. Hors de ce contexte point de salut, sauf pour les chômeurs à qui il est accordé un délai de grâce courant jusqu’au terme de leurs indemnités.
Etant donné la situation difficile que traverse le secteur, il y a un certain nombre de journalistes qui se voient un jour privés de ce sésame faute de réunir les conditions requises. Et la plupart d’entre eux n’ont même pas de micro à l’antenne pour protester. Les voilà bannis.
Bannis, exclus ? Voire. Contrairement à la médecine, l’exercice illégal du journalisme n’existe pas. Ce ne sont fondamentalement ni la fiche de paie, ni la carte de presse qui font le journaliste dont un adage à tout faire dit d’ailleurs : «journaliste un jour, journaliste toujours».
La plupart des contributeurs qui un jour de 1912 fondèrent Les Soirées de Paris, Guillaume Apollinaire en tête, n’étaient probablement pas encartés ce qui ne les a pas empêchés d’écrire jusqu’en juillet 1914. Depuis la réactivation de cette revue en octobre 2010, une trentaine de plumes a produit, pour le seul plaisir d’informer des lecteurs,1150 articles. Parmi ces trente, on compte d’authentiques encartés collaborant aux Soirées en marge de leur activité principale,une universitaire, un petit groupe de journalistes privés d’emploi rémunéré et une poignée de journalistes retraités.
Ce qu’ils ont produit relève incontestablement du journalisme et il n’est point besoin de commission pour le certifier quoique la revue dispose d’un numéro ISSN (2119-3622) délivré par la BNF. La meilleure reconnaissance est celle des pairs et fondamentalement des lecteurs.
Reste ce sentiment d’injustice pour ceux qui additionnent de longues années de métier et qui se voient écartés un beau jour d’un système agissant objectivement comme un couperet. La presse va mal et ses acteurs individuels, surtout les anonymes, survivent difficilement. Ils veulent pourtant continuer de travailler dans un milieu qu’ils ont choisi avec un élément (la carte) qui ne fait pas tout on l’a dit, mais qui aide beaucoup.
D’ici quelques semaines auront lieu les discrètes élections des membres de la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels. Le premier tour est réservé aux organisations syndicales et le second aux candidatures individuelles si le quorum n’est pas atteint (le 12 mai) au premier. Entre temps aura eu lieu le congrès du Syndicat national des journalistes (SNJ).
Il serait bon que nos chères consœurs et nos chers confrères des syndicats représentatifs et membres de la Commission se penchent sur une définition d’attribution (années d’ancienneté?) qui ne déboucherait pas sur autant de rancœur inutile.
Cela fait cette année, 80 ans que la carte de presse existe. On le voit en France mais aussi ailleurs, la liberté de la presse est comme un fortin sans cesse attaqué. Formons donc des vœux pour que ceux qui se présentent légitimement à son entrée soient accueillis avec tout le discernement légitime.
PHB
http://www.franceinter.fr/depeche-patrick-cohen-decoupe-sa-carte-de-presse-en-direct
En avoir une ou pas… Tout change.
Par exemple maintenant pour faire des photos à l’Assemblée Nationale ( lieu officiel tout de même) certains photographes présentent une carte stipulant qu’ils travaillent pour Citizen Side, pseudo agence photo immatriculée aux Iles Vierges Britanniques et qui paye donc ses photographes (contributeurs comme indiqué) par paypal sans aucune charge sociale évidemment (ce qui est illégal).
N’importe qui peut s’inscrire sur Citizen Side et diffuser donc ses images.
Mieux, l’Afp a même signé un partenariat avec Citizen Side et le logo de l’Afp apparait sur le site.
Tant que de telles situations seront acceptées la Carte de Presse perdra petit à petit son intérêt et petit à petit le salariat des photographes ou journalistes va disparaitre et les agences immatriculées dans des paradis fiscaux vont se développer et les journalistes vont perdre leur carte de presse.
Pourquoi Pascale Clark n’a pas eu sa carte de presse ?
Une des raisons est qu’elle est employée en tant qu’intermittente, or ce statut est administrativement incompatible avec celui de journalistes. De plus en plus d’employeurs paient les journalistes au cachet (intermittent), en droits d’auteur (auto entrepreneur) parce que cela leur coûte moins cher et leur impose moins de contraintes lorsqu’ils veulent faire cesser la collaboration.
Le sujet est complexe, même au royaume d’Ubu. Les critères d’attribution de la carte de presse, uniquement basés sur la rémunération et son origine, semblent révéler un corporatisme des plus rigides de la part de la commission. Mais il est vrai que si cette commission devait se fonder sur le contenu de la production d’un auteur pour attribuer cette carte professionnelle, elle serait en position d’exercer une censure: or, elle n’est pas un juge du contenu (ce qui ne manque pas d’étonner dans le cas particulier de Pascale Clark). Cependant, la situation est inextricable pour les journalistes qui sont de plus en plus nombreux à exercer leur profession en dehors des rédactions (un choix imposé par les directions des médias pour introduire plus de « flexibilité » dans la gestion des effectifs et pour comprimer leur masse salariale). Certes, la condition de « pigiste salarié » n’est pas un obstacle à l’obtention de la carte professionnelle, mais est particulièrement précaire. Certains journalistes indépendants créent des sociétés, mais ils ne sont alors plus rémunérés par des entreprises de presse (ayant un numéro de commission paritaire) et perdent leur droit à la carte professionnelle. Absurde. Il ne leur reste plus qu’à en faire leur deuil, ou à obtenir pour leur société le statut d’agence de presse (sous certaines conditions dans l’exercice de l’activité) délivré par la CPPAP (Commission paritaire pour les publications et agences de presse). Ce qui leur permet de retourner auprès de la Commission paritaire des publications et agences de presse) pour être enregistrés non plus comme journalistes, mais comme directeurs de presse. Et de recevoir une carte… un peu différente mais qui exprime une même reconnaissance professionnelle. Courteline en aurait fait ses délices…
Lu sur Mediapart en décembre dernier : http://blogs.mediapart.fr/blog/pucciarelli-alain/081214/commission-de-la-carte-de-presse-des-journalistes-professionnels-une-exception-francaise-un-pouvoir discrétionnaire
http://blogs.mediapart.fr/blog/pucciarelli-alain/081214/commission-de-la-carte-de-presse-des-journalistes-professionnels-une-exception-francaise-un-p
Quand on connaît la « déontologie » de Monsieur et Madame Clark-Cohen, leur haine du populaire, leur déférence aux puissants, on ne se pose pas la question de leur encartement : ils ont la carte de la bien-pensance… Même en coupant sa carte en deux, Cohen est le prototype du « chien de garde » comme dit un vrai journaliste, Serge Halimi… Il est vrai qu’il travaille au « Monde Diplomatique » qui a perdu toutes ses aides à la presse pour mal-pensance.
Le Monde Diplomatique est le journal français qui a le plus d’éditions dans la monde, qui est considéré comme un des journaux de référence par tous les intellectuels et les universitaires du monde entier. C’est sans doute pour ça que Madame Clark et Monsieur Cohen n’ont pas signalé cette « punition » subie le Monde Diplo, contraint désormais d’envoyer les exemplaires pour ses abonnés à l’affranchissement postal normal (ce qui n’est pas le cas de grands journaux comme Gala ou Closer) . Ils ont pleuré pour Charlie, jamais pour le Diplo qui risque de mourir sans frères tueurs. En plus, Madame Clark et Monsieur Cohen n’ont JAMAIS invité Halimi et toutes les plumes du journal (John Berger, Susan George, Alain Gresh, Dominique Vidal…) Il est vrai que tous ses gens continuent à défendre la cause palestinienne, ce qui pour Monsieur Cohen est synonyme d’antisémitisme… Je crois qu’au fond, il a bien fait de couper cette carte qui ne le concerne pas dans sa pratique quotidienne de l’enfumage matinal…
(Précision pour être tout à fait honnête, j’écris régulièrement dans le Diplo)
Sans répéter ce qui est jutement dit plus haut, une question : une haute autorité des journalistes sur le modèle du CSA ne serait-elle pas nécessaire ?
En avoir ou pas… Ben manifestement il en a des c…iseaux l’animateur/journaliste (ou doit-on dire l’inverse?) de France Inter. Quelle belle réaction d’indignation, de solidarité, de confraternité (pardon, de consororité) que cette prestation en direct sur l’antenne de la radio publique! Spontanée. Un vrai cri du coeur. Et pas prémédité du tout. Des ciseaux pour couper une carte de presse, il y en a à portée de main dans tous les studios de radio; chacun le sait. L’animateur/journaliste de France Inter est d’ailleurs un expert dans le maniement de cet instrument habitué qu’il est à couper la parole à ses invités et à couper les cheveux en quatre à l’antenne. Mais, avouons le, des ciseaux dans les mains d’un journaliste, franchement ça fait bizarre! Anastasie, si tu nous lis…
Bon, revenons à cette immense affaire… que dis-je… à ce coup de tonnerre médiatique, si tonitruant que même mes chères Soirées de Paris y sont allées de leur commentaire, bien troussé d’ailleurs sous la plume de Philippe. D’abord, reconnaissons que tailler aux ciseaux un rectangle de plastique ne produit pas le même effet visuel et auditif que « déchirer » sa carte, qu’elle soit de presse, d’électeur ou de tel ou tel parti. Le geste n’a pas la même élégance, la même fluidité. On l’a bien vu, l’usage des lames d’acier contraint à un combat, bref mais intense, avec le plastique récalcitrant. Adieu l’élégance…
Ensuite, il est bon que les non journalistes le sachent, la carte de presse est renouvelée tous les ans, généralement au premier trimestre. Ce qui veut dire que l’animateur/journaliste de France Inter a vraisemblablement taillé en pièces sa carte 2014 qui ne sert plus à rien. Sauf aux collectionneurs maniaques qui entassent leurs anciennes cartes dans un tiroir… Bref, que les auditeurs de France Inter se rassurent, la carte de presse 2015 de l’animateur/journaliste est bien au chaud dans son portefeuille. Ou le sera dans quelques jours si la Poste a un peu de retard. Et celle-là, il pourra la découper en direct au printemps prochain. Ce ne sont pas les motifs d’indignation qui manqueront…
Cela étant dit, je reste, comme beaucoup d’autres, perplexe sur la nature du message que l’animateur/journaliste de France Inter cherchait à adresser à son auditoire. A t-il honte de cette carte de presse qui a été refusée à son amie et consoeur? Si c’est le cas, il lui faut être cohérent et renoncer également à sa nouvelle carte. Et aussi à l’abattement fiscal accordé aux détenteurs du précieux plastique. On le remercie par avance de nous tenir informé à l’antenne de ces décisions sur ces deux points, faute de quoi on serait amené à s’interroger sur sa sincérité et à en conclure que son petit numéro sur les ondes matinales du service public n’était qu’une piètre et indigne comédie. J’attends, plein d’espoir…
Deux précisions à ajouter à ce tour d’horizon sur les bienfaits d’en avoir ou pas.
Il n’y a plus besoin de solliciter le renouvellement annuel de sa carte quand les décennies de métier s’additionnent : elle est alors délivrer « à titre honoraire ».
La déduction forfaitaire octroyée aux journalistes est passée de 30 % de leurs revenus jadis à une allocation pour frais d’emploi déductible d’un montant uniformément fixé à 7 650 €. Pas de quoi faire hésiter à découper sa carte !