« Il n’est point gai d’être mort, tout cela manque de confort, si j’avais un bout de ficelle, je sonnerais la sentinelle ». Ces quatre vers de la « Ballade du pauvre Macchabé mal enterré » sont issus d’un texte dont il a été donné lecture il y a près d’une semaine à la Maison de la poésie. Son auteur est René Dalize, mort en 1917 près de Craonne. Souffle coupé par un obus. Il était « le plus vieux camarade » de Guillaume Apollinaire. Laurence Campa, notamment auteur d’une récente biographie d’Apollinaire et aussi des « Poètes de la grande guerre » a lu avec Philippe Pigeard, à la Maison de la poésie, nombre de textes émouvants signés de différents auteurs dont cette ballade de René Dalize, l’un des premiers piliers des Soirées de Paris.
René Dalize a été plusieurs fois blessé au Front où il retournait pourtant avec obstination. Il y avait écrit le texte initial qui s’intitulait « La ballade à tibias rompus » qu’il avait signé « Baron de Franquevaux, gradé de l’échelon » et polycopié sur gélatine dans une de ces revues héroïques imprimées dans les tranchées : « Les imberbes ». Le texte aurait ensuite été dicté à Apollinaire par Dalize et c’est André Salmon autre camarade des deux premiers qui a récupéré les précieuses notes à la mort d’Apollinaire en 1918.
D’autres détails sont livrés dans un précieux fascicule édité en 2009 à 311 exemplaires seulement chez Abstème et Bobance. La « Ballade du vieux Macchabé mal enterré » contient une préface de Laurence Campa et le livre est suivi de deux textes signés André Salmon et Guillaume Apollinaire. Le tout forme un ouvrage d’une vingtaine de pages que l’on trouvait encore miraculeusement sur le site de la Fnac fin juin pour un peu plus de cinq euros.
Extrait de la Ballade:
« Aujourd’hui, vieux MACCHABE vertueux,
Et soumis à la loi
Je ne veux plus aimer de mes fiancées aucune
Que celles à l’œil vitreux
Et au sein flou couleur de lune.
Satané vent ! Le coriza m’a pris.
Mes pieds humides vers l’azur éthéré
Se dressent incompris
Je suis le pauvre MACCHABE mal enterré ».
Pour le lire en entier on peut aussi aller sur le site ci-dessous (1) dont l’auteur a pris la peine de le retranscrire. Attention il y est précisé que Dalize est mort à la ferme de Cogne-le-vent, c’est ce que croyait savoir Salmon, en fait c’était la ferme d’Hurtebise « où cogne le vent », a gentiment corrigé plus tard la préfacière Laurence Campa.
Il reste à retrouver un jour la sépulture de Dalize, le corps enveloppé d’un drapeau, dans ces terres de guerre dont ressortent encore chaque année et cent ans plus tard, de nouveaux cadavres mal enterrés.