Attachez votre ceinture, retenez votre souffle ! Hong Kong vous invite à un voyage spectaculaire. Il ne s’agit plus d’atterrir à pic, à l’aéroport de Kai Tak (fermé en 1998), en frôlant les toits avant de plonger sur le tarmac, mais de remonter le temps de près de 4500 ans. Ces jours-ci, et jusqu’au 8 janvier 2024, l’imposant et tout jeune Hong Kong Palace Museum -ouvert au public depuis le 3 juillet 2022- vous invite à rencontrer la fascinante et mystérieuse civilisation Sanxingdui. Culture majeure de la Chine néolithique, datant de 2050 à 1250 ans avant Jésus Christ, celle-ci n’a pourtant été découverte qu’en 1986. Cette population du Sangxingdui, incroyablement avancée pour son époque, vivait jadis au cœur de la province du Sichuan, dans la plaine de Chengdu, plus précisément dans l’actuelle banlieue ouest de la «ville district» de Guanghan. Pourquoi ce rendez-vous est-il incontournable pour tout chasseur au trésor du « Port au Parfum » ? Au-delà des 120 objets anciens en bronze, en or et de jade présentés au public hongkongais, l’exposition est le fruit de l’une des découvertes du vingtième siècle les plus extraordinaires et les plus étonnantes concernant l’âge néolithique.
Il est fort intrigant de constater que l’art de la civilisation Sanxingdui diffère des habituelles formes artistiques chinoises. Certains chercheurs émettent à ce propos l’hypothèse que sa région environnante aurait été le berceau de peuples parlant des langues ancestrales tibéto-birmanes. Quoi qu’il en soit, la révélation de l’existence de ce royaume de Sangxingdui et de son mode de vie contredit la thèse qui primait jusqu’alors, selon laquelle le bassin du Sichuan, au Sud-Ouest du Fleuve Jaune, avait été isolé de l’âge du bronze jusqu’à la conquête de l’Ancien Royaume de Shu par l’État de Qin, en 316 avant Jésus Christ.
En effet, la culture Sangxingdui est identifiée comme appartenant à l’Ancien Royaume de Shu, dont les origines dateraient de 1046 avant Jésus Christ, et régnait dans la région correspondant aujourd’hui à la province du Sichuan. Selon les «Chroniques de Huayang», compilées par l’historien de référence Chang Qu de la dynastie Jin -au pouvoir de 266 à 420 après Jésus Christ-, l’Ancien Royaume de Shu aurait été fondé par Cancong . Or, Chang Qu décrit ce dernier avec d’immenses yeux saillants. Justement, cette caractéristique se retrouve systématiquement dans les multiples masques et figures de bronze ou d’or du site de Sanxingdui, que l’on ne se lasse pas d’admirer au Hong Kong Palace Museum. Le surdimensionnement des yeux pourrait également s’expliquer par la pratique de son culte. Certains érudits suggèrent que le peuple Shu croyait au pouvoir des chamans de communiquer avec les dieux en utilisant des objets au caractère hypnotique en forme d’œil. D’autres chercheurs supposent que le culte du soleil existait dans la plaine nuageuse de Chengdu. Dans ce cas, les yeux auraient symbolisé le dieu de cet astre et de la lumière.
Le visiteur de l’exposition admirera aussi des objets aux formes d’oiseaux ou de poissons. Se référant aux fameuses «Chroniques de Huayang», les archéologues présument qu’ils représentent les totems des dirigeants de clan de l’Ancien Royaume de Shu, en l’occurrence de Boguan, de Duyu et de Yufu.
Plusieurs représentations de créatures étranges, qualifiées de «mythiques», aux formes inclassables, qui auraient servi à des rites, interpellent. Par exemple, une statue en bronze, dessinant un corps de dragon aux griffes terrifiantes, avec une tête de tigre aux dents acérées, regardant au loin, dans la même direction qu’un canard non effarouché posé à ses pieds, fascine. Comment l’interpréter ? Comme il ne reste pas de trace écrite, le mystère demeure. Il n’y a plus qu’à laisser libre cours à son imagination. Pour l’instant, les chercheurs estiment que toutes ces créations incroyables ne sont pas uniquement le fruit d’un imaginaire créatif. Elles témoigneraient de la vision et de connaissances du peuple Sanxinghui sur le cosmos. Difficile de glaner une explication plus précise.
Force est de constater que la découverte miraculeuse de cet ancien monde a engendré de nouvelles énigmes à résoudre. Elles concernent, certes, la signification attachée aux éléments trouvés par les archéologues, mais aussi et surtout les origines de l’âge de bronze et des échanges de savoir entre les diverses populations. Comment la culture de Sanxingdui, symbolisée par des objets issus d’une technique de fusion du bronze aussi sophistiquée, est-elle née ? Pour assembler toutes les pièces du puzzle, il faudra remonter encore plus loin dans le temps.
Edwige Murguet, à Hong Kong
Merci de signaler cette expo. Il y a eu une expo de ces objets il y a une vingtaine d’années à l’Hôtel de ville de Paris. A noter : Sanxingdui signifie Mont des Trois Etoiles ».
…à l’Hôtel de ville de Paris du 14 octobre 2003 au 28 janvier 2004.
En effet époustouflant, ahurissant, bouleversant, une intense découverte artistique, historique, humaine.
A l’époque de grandes expositions archéologiques étaient visibles à Paris, aujourd’hui il reste Ramsès et Toutankhamon…
Mais ne me dites pas que vous encouragez le public à prendre l’avion pour aller voir ça à Hong-Kong.