L’Espace Monte-Cristo, une ode à la sculpture contemporaine

En poussant la porte du 9 rue Monte-Cristo, une rue banale de l’ancien village de Charonne (20e arrondissement de Paris), on est tout étonné de découvrir un espace d’exposition insolite dédié à la sculpture contemporaine. C’est là, dans un ancien entrepôt industriel de 300 m2, que s’est installé en 2018 l’Espace Monte-Cristo, qui est l’antenne parisienne de la fondation Villa Datris de l’Ile-sur-la-Sorgue. L’Espace Monte-Cristo organise chaque année sur une nouvelle thématique des expositions originales des œuvres de la Collection de la Fondation Villa Datris. L’ancien entrepôt industriel de la rue Monte-Cristo n’a pas été choisi par hasard. Il regroupait autrefois les bureaux et le stockage de la société de cartons RAJA, à l’origine une petite entreprise de distribution de cartons, créée par Rachel Marcovici en 1954.

Sa fille, Danièle Marcovici, aujourd’hui présidente du Groupe RAJA (devenu leader européen de l’emballage) et également présidente et fondatrice de la Fondation Villa Datris, a toujours été attachée à ce lieu historique où elle a fait ses débuts dans la profession. Créée en 2011 par Danièle Marcovici et Tristan Fourtine, la Fondation Villa Datris est née du désir de promouvoir la sculpture contemporaine à travers des expositions gratuites et ouvertes à tous.

Après un lifting impeccable, l’ancien entrepôt industriel est parfaitement adapté à la présentation de sculptures. Semi-ouvert, il crée une ambiance suffisamment intime pour rendre les œuvres accessibles à tous. Chaleur et clarté : une lumière zénithale et les grandes verrières qui donnent sur deux jardinets intérieurs verdoyants éclairent le lieu. On parcourt les différents espaces d’exposition répartis sur deux étages et les jardinets, un peu comme on découvrirait les différentes pièces d’une maison d’artistes chaleureuse. Et on va de surprise en surprise tant les œuvres dévoilées lors de l’exposition en cours sur la sculpture céramique, « Toucher terre », sont variées et insolites.

« Toucher terre » réunit plus de 50 céramiques d’artistes français et internationaux autour du thème de la terre. Mais plutôt que de toucher terre, c’est plutôt un envol vers la création audacieuse qui s’offre à nous au travers d’assemblages peu conventionnels de matériaux ainsi que de détournement de techniques ou de formes traditionnelles. Il en résulte un déchaînement réjouissant de couleurs, de textures et de formes d’essence résolument contemporaine. Aspect étrange, agrégat improbable, matière qui semble parfois tombée du cosmos ou au contraire pièce poétique, mordante, hyperréaliste… Cet éventail de sculptures reflète parfaitement les choix judicieux d’une mécène éclairée et l’éclectisme de son gout.

Certaines créations se montrent proches d’espèces végétales, comme la sculpture Emergence de Sophie Lavaux (image d’ouverture), un assemblage de fines lamelles de biscuit de porcelaine, qui flottant dans un bassin du jardin intérieur évoque des coraux. D’autres sont plus militantes. Le grand vase de la série « Vaincre le virus » (ci-contre) de l’artiste engagé Barthélémy Toguo représente le fléau des épidémies de virus qui touchent l’Afrique. Militantisme et hyperréalisme pour Suzanne Husky dont le bidon de lessive en céramique exprime l’engagement écologiste en dénonçant l’hypocrisie du discours marketing lénifiant sur des produits polluants. « Les Colonnes »  de Johan Creten, précurseur du renouveau de la céramique dans l’art contemporain, mêlent son goût pour les allusions sexuelles et son intérêt pour la narration par la représentation d’éléments de la nature dont « Couple » présenté ici. Dans le grand patio verdoyant, Elsa Sahal détourne avec humour et impertinence l’un des sujets les plus récurrents de l’histoire de l’art occidental en créant une vénus ouvertement provocatrice, à la fois attrayante et indécente.

Le clou de l’exposition se trouve au premier étage. Une installation de Kim Simonsson, inédite et spectaculaire tant par la taille et la matière que par le côté onirique retient notre attention: « Moss People » (ci-dessous). Son “Peuple de la Mousse”, composé d’enfants et d’animaux recouverts de mousse, semble sorti d’un conte nordique. C’est en recouvrant de fibre de nylon vert ses sculptures en grès que Simonsson obtient cette étonnante texture semblable à la mousse. Comme dans les contes, l’installation a un côté effrayant mais on imagine que l’aventure des « Moss people » aura une Happy End.

Lottie Brickert

Espace Monte-Cristo, 9, Rue Monte-Cristo – 75020 Paris. Ouvert du mercredi au dimanche de 11h à 18h30. Entrée libre. Toucher terre, exposition sur la sculpture céramique, du 15 avril au 17 décembre 2023

Photos: ©LottieBrickert
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4 réponses à L’Espace Monte-Cristo, une ode à la sculpture contemporaine

  1. Annie T dit :

    Johan Creten, je l’avais vu à La Piscine à Roubaixw et j’avoue que ses créatures ne m’avaient pas « emballée ».
    Emergence de Sophie Lavaux me convainc : j’irai à l’espace Monte-Christo, merci.

  2. M- Christine dit :

    Merci Lottie,
    Encore une superbe trouvaille !!! Je vais m’empresser de divulguer cette magnifique adresse et m’y rendre dès que possible .
    Encore Bravo !!!

  3. Raymond dit :

    Originalité des créations présentées, dans une symphonie de formes, de brillances et de couleurs : ceramic is magic !
    L’article de Lottie m’a fait revenir dans mon ancien quartier de vie. Merci!

  4. Raymond dit :

    Originalité des créations présentées, dans une symphonie de formes, de brillances et de couleurs : ceramic is magic !
    L’article de Lottie m’a fait revenir dans mon ancien quartier de vie. Merci!

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