Peu après la mort de Mahsa Amini au mois de septembre 2022, démolie par ses geôliers lors de sa détention pour un voile mal porté, Élisabeth Badinter sur l’antenne de France Inter, avait commenté l’événement en ces termes: « Quand Dieu pèse presque entièrement sur une société, c’est la fin des libertés féminines. » De la part de cette féministe, notamment spécialiste du siècle des Lumières, le verdict ne pouvait être plus limpide. Sa réflexion ô combien pertinente nous revient à l’esprit en regardant le documentaire de Claire Billet. Celui qui est actuellement disponible sur Arte à propos de la révolte des femmes iraniennes à l’encontre de leurs persécuteurs. L’actrice Golshifteh Farahani, née à Téhéran, a apporté son concours au film afin « d’amplifier la voix du peuple iranien ». Les personnes sensibles sont averties d’emblée que le documentaire « Femme, Vie, Liberté », comporte des scènes difficiles. Le titre a fait sien le slogan d’un mouvement insurrectionnel dont l’écho est porté par les réseaux sociaux.
En cinquante-deux minutes on a là un concentré de ce qu’une équipe d’esprits rassis et misogynes, ayant pris le pouvoir il y a maintenant un certain temps, est capable de faire. Des centaines de morts dont des enfants, des classes d’écoles gazées (230 attaques chimiques en tout), des pendaisons, des tortures, des matraquages aveugles, la répression mise en œuvre est non seulement impitoyable mais il est à craindre qu’elle ne s’accentue vu le durcissement législatif qui vient d’être voté récemment sur le port du voile. Le Parlement iranien a en effet approuvé voici un peu plus d’un mois un projet de loi qui prévoit des peines de prison pouvant aller jusqu’à dix ans, contre toute femme qui ne porterait pas le voile en public. Certains pensent que ce régime religieux va bientôt s’effondrer mais pour l’instant cela n’en prend pas le chemin. En dépit du courage extraordinaire de ces femmes iraniennes (et des hommes qui les soutiennent) s’affichant sans voile dans la rue, le danger immense qu’elles courent à se dévoiler ainsi ne semble toujours pas les décider à reculer.
Dans cette recension des méthodes répressives, un justificatif ressort, celui de « l’offense à Dieu ». Soit une sorte de forfait bien pratique permettant notamment de pendre des jeunes hommes qui étaient descendus dans la rue afin de soutenir les femmes révoltées. Ceux qui en Europe se croient à l’abri de ce genre de régression ont bien tort. surtout que là-bas, en Iran, comme on peut le voir tout au long du documentaire, il y a des femmes correctement voilées, tout de noir vêtues et qui relaient, comme les néfastes harpies qu’elles sont, les dogmes d’un système pour le moins rétrograde.
Chaque jour sur les réseaux sociaux, principalement sur l’ex-réseau Twitter, l’information est relayée. Le journaliste du Point, Armin Arefi, fait partie de ceux qui ne se lassent pas, plusieurs fois par jour, de publier ce qui se passe au pays des mollahs. Le 25 septembre par exemple il se faisait le porte-voix d’une écolière que l’on interrogeait à la télévision sur ce qu’elle aurait à dire au président Raissi si c’était possible. Réponse de la fillette: « J’aimerais ne jamais porter le hidjab ». Sachant comme le rappelle Armin Arefi que le voile est obligatoire en Iran à partir de sept ans. L’esprit des Lumières ne fait pas partie des options.
Au contraire des grandes chaînes de télévision, les programmes d’Arte nous incitent à réfléchir et à voir plus loin. Par exemple en franchissant virtuellement la frontière qui sépare l’Iran de l’Afghanistan. Dans ce dernier cas, on a beaucoup moins de nouvelles. On sait bien qu’elles sont probablement mauvaises. Car les Talibans qui jouent en tête de la première division, sur le terrain de la répression des femmes, ont tout fermé à clé. Les femmes y sont entièrement voilées, une grille voilant jusqu’à leur regard. Elles n’ont plus accès à nombre d’emplois et les filles se voient privées d’accès à l’enseignement secondaire. Là encore les théocrates viennent donner raison à Élisabeth Badinter, en plongeant méthodiquement la population féminine dans la nuit noire. Les voix y sont bien moins nombreuses qu’en Iran. Le système a non seulement mis les femmes en état de claustration mais il a de surcroît coupé tous les micros. On ne sait pas bien si les Afghanes entendent ce qui se passe ailleurs, par dessus les cris de celles qui sont flagellées en public.
PHB
« Femme, Vie, Liberté, une révolution iranienne », jusqu’au 24 décembre sur Arte
Il s’agit plutôt de maladie mentale.
On croyait que le progrès allait toujours dans le même sens. Aujourd’hui c’est la régression qui progresse. Contre cette misogynie fanatique, des hommes soutiennent les femmes en lutte. Mais il semble qu’ils ne soient pas assez nombreux.
ces « néfastes harpies »,porteuses d’une idéologie obscurantiste,on les voit maintenant partout en France et en Europe alors que nous leur offrons la pure liberté.Allez comprendre!
« Là encore les théocrates viennent donner raison à Élisabeth Badinter, en plongeant méthodiquement la population féminine dans la nuit noire. » Oui, bravo d’oser le dire. Mais n’oublions pas que la nuit noire dans laquelle on plonge les femmes est celle même dans laquelle sont plongés tous les hommes (viri) victimes de croyances inculquées par les mères « néfastes harpies », expression saisissante, qui ne font que transmettre l’idéologie dominante dont elles sont les premières victimes. Une chaîne difficile à rompre…