La bibliothèque Richelieu a retrouvé tout son éclat après un travail de rénovation et de modernisation de choc qui a duré dix ans. Ce coup de jeune a notamment le mérite de rendre ce haut lieu de culture plus accessible au grand public. Grâce au décloisonnement, lecteurs et visiteurs peuvent circuler librement dans le grand hall du rez-de-chaussée. Là, l’élégante salle Ovale, désormais ouverte à tous, est une invitation à s’abreuver de culture dans un endroit lumineux et confortable. 20.000 ouvrages y sont mis librement à la disposition du public, dont la plus grande collection de BD en accès libre en France. On peut aussi s’y instruire en explorant la richesse des collections de la BnF grâce à des bornes de médiation intelligentes. Près de la salle Ovale, un bel escalier, œuvre contemporaine constitué d’une hélice ajourée en acier et aluminium vernis, mène au premier étage où se trouve le musée. Plus loin, une rambarde permet à tous de jeter un coup d’œil à la superbe salle Labrouste, réservée aux lecteurs accrédités, qui a inspiré la salle Ovale. Créée en 1868 par Henri Labrouste, cet espace était avant-gardiste : colonnes et structures en fer et fonte pour la sécurité des collections, lumière diffusée par verrières et oculites, poêles calorifères et chaufferettes aux pieds pour le confort des lecteurs.
Dans la cour d’Honneur, le plus vieux bâtiment date de 1719. Si la bibliothèque royale y emménagea en 1721, sa fondation lui est bien antérieure. Elle a été fondée au Louvre, en 1368, par le roi Charles V avec 900 manuscrits. Le dépôt légal, institué par François 1er en 1537, dans un objectif mémoriel mais aussi de censure des écrits séditieux, a permis d’accroître considérablement les collections.
Pour la petite histoire, en 2010, en raison des travaux, il a fallu déplacer la statue de Voltaire que l’on peut voir dans l’entrée du bâtiment de 1719. Une forte odeur s’est alors échappée de son socle. On l’ignore souvent mais c’est là qu’est conservé… le cœur du philosophe ! Après un nouveau traitement de conservation, l’organe a pu regagner le socle de la statue d’Houdon. Et, le cœur de notre grand philosophe a pu à nouveau vivifier la BnF Richelieu, tout comme son cerveau vivifie la Comédie Française où il est conservé, alors que son corps repose au Panthéon.
Au premier étage, le musée rénové occupe certains des plus remarquables espaces comme la galerie Mazarin, la salle des Colonnes ou la salle de Luynes. La BnF Richelieu y présente une sélection de près de 900 trésors, emblématiques des collections constituées au fil des siècles. Car la BnF, ce ne sont pas que des imprimés. Aujourd’hui la BnF conserve plus de 40 millions de documents principalement sur le site Mitterrand pour les imprimés et les documents audiovisuels, et, Richelieu pour les collections dites spécialisées (manuscrits, dessins, gravures, photographies, cartes et plans, monnaies et médailles, antiques et bijoux…) soit plus de 22 millions de documents.
C’est sans conteste la galerie Mazarin qui comprend les pièces les plus spectaculaires, dévoilées de façon chronologique. On peut notamment y voir le siège pliant du roi Dagobert qui a servi pour la dernière fois en 1804 à Napoléon; le jeu d’échec en ivoire dit de Charlemagne; des manuscrits enluminés avec couverture en or et pierres précieuses; l’une des premières bibles de Gutenberg, imprimée en 1455. À propos de cette bible (ci-dessus), il est à noter que, sans doute pour ne pas perturber les lecteurs, elle a curieusement été imprimée avec des caractères imitant l’écriture manuscrite ! On remarquera également une carte marine dite de Colomb de 1492, un globe de Coronelli, et, plus près de nous, une partition manuscrite de Chopin, des affiches touristiques de Cassandre, une litho de Miro, des photos de Cartier-Bresson…
La galerie Rondel abrite le musée des Arts et spectacles avec photos de tournage de films, affiches, maquettes… On y remarque aussi un sauf-conduit de 1944 permettant à l’actrice étrangère, Maria Casares, de circuler en France pendant un tournage. La salle des Colonnes et la salle de Luynes exposent des antiques, la salle Barthélémy, des monnaies et médailles. Le parcours de visite du musée est jalonné de 18 bornes de médiation numérique intelligentes. Leur manipulation est simple, les textes, vidéos et audios sont courts, accessibles, attrayants et doublés de jeux et enquêtes pour retenir l’attention des plus jeunes. Ils enrichissent la visite du musée. On peut par exemple entrer dans l’atelier d’un copiste médiéval et tout apprendre sur la fabrication d’un manuscrit ou encore manipuler un globe terrestre en 3D, mener une enquête sur un bijou…
Dommage que le musée soit payant car à voir la foule qui circule dans le grand Hall et qui profite de la salle Ovale, on peut penser que le grand public n’est pas indifférent à la rénovation de la BnF Richelieu.
Lottie Brickert
Une réserve concernant l’escalier… L’ancien était droit et spectaculaire… Le remplacer par un nouveau a fait polémique car il a fallu détruire ce patrimoine.
La salle Labrouste, ancienne salle de lecture de la BN, appartient désormais à l’Institut national de l’histoire de l’art.
Les deux institutions se côtoient et communiquent entre elles.
La cour d’honneur et la cour Vivienne ont été aussi transformées. Les tilleuls ont été remplacés par les palmiers. La statue de Sartre en marche n’y est plus. Je me demande ce qu’aurait dit Simone de Beauvoir du reaménagement de ces lieux qu’elle a tant fréquentés.
L’escalier est extrêmement choquant pour non respect des aspects historiques d’un bâtiment. Il ne s’agit pas des coulisses et il n’y a même pas une tentative d’intégration dans l’architecture. J’appelle ça le c.c. nerveux d’un architecte. Pour le reste c’est très beau. Par contre le logiciel de recherche des documents est très mal construit. Il faut être bibliothécaire pour savoir contourner les absurdités du système. La bibliothèque propose des cours pour l’utilisateur. Il y avait autrefois au CNAM un cours de techniques d’expression de la pensée scientifique. Il manque cruellement ici.
Escalier d’honneur détruit pour le remplacer par un nouvel. Un escalier patrimonial détruit. Cela n’est nullement indiqué dans l’article. Oubli ou omission ?
Bonjour cher Lecteur,
Impossible de tout consigner dans un article de 5000 signes surtout s’agissant de la BNF Richelieu !
Je rejoins Kotalska Barbara pour déplorer la disparition de la statue de Jean-Paul Sartre. Il nous accueillait au ras du sol, grandeur nature, on aurait presque pu aller le saluer.
Voltaire lui, a toujours droit de cité (avec son cœur !).
La BnF conserve aussi dans ses archives la carte de lecteur de J.-P. S., où il est curieusement photographié de profil. Trop anticonformiste ?
Quant à l’escalier, je ne le regrette pas, il avait visiblement été conçu pour se débarrasser des lecteurs ayant atteint la date de péremption…
Lors de ma visite j’ai posé la question « où est passé J-P S » ?
Personne n’a pu me répondre avant qu’une responsable semblant appartenir à la hiérarchie m’a indiqué que la statue appartenait à la ville de Paris qui l’avait récupérée.
Pour en faire quoi ? A la bibliothèque personne ne sait. Quelqu’un a- t- il des informations?