« On a dit de Picasso que ses œuvres témoignaient d’un désenchantement précoce. Je pense le contraire. Tout l’enchante et son talent incontestable me paraît au service d’une fantaisie qui mêle justement le délicieux et l’horrible, l’abject et le délicat« , disait Guillaume Apollinaire.
Quelle bonne idée que ce petit cabaret de poche qui nous fait remonter le temps, le temps béni du Bateau Lavoir « Fournaise l’été, glaçon l’hiver« , le temps ou Fernande et Picasso sont amoureux.
C’est l’histoire des jeunes années du peintre tout juste débarqué d’Espagne à partir de 1901 (il a 20 ans) ponctuées des premières rencontres qui seront déterminantes : les poètes Max Jacob (1901), André Salmon et Apollinaire (1904) puis Gertrude Stein, Matisse (1905), Braque (1907), Fernand Léger (1910).
L’évocation se termine en 1914 quand George Braque et André Derain sont mobilisés et quand Guillaume Apollinaire s’engage.
Pendant ces 15 années riches de rencontres et de créations, Picasso va se révéler petit à petit à travers sa période bleue (1901-1904), rose (1904-1906), sa période africaine (1907-1909) et sa période cubiste (1910-1919).
Dans la petite salle du théâtre de poche, la reconstitution prend vie avec des textes, une musique et des chansons originales : des textes de Guillaume Apollinaire, Max Jacob ou André Salmon lus par Jean-Jacques Beineix. De la musique : sur scène le piano de Reinhardt Wagner et l’accordéon de Jean-Claude Laudat. Du chant : Heloise Wagner est Fernande et Emmanuelle Goizé est la coryphée du spectacle.
Tous nous embarquent dans leur belle machine à remonter le temps, un hommage gai, riche et vibrant que Picasso aurait sûrement apprécié, lui qui disait « L’art lave notre âme de la poussière du quotidien« .
En sortant du spectacle sur le boulevard du Montparnasse, la clameur montait, ponctuée de coups de klaxons. La France venait de gagner 2-0 contre l’Allemagne.
Marie-Pierre Sensey
Théâtre de poche Montparnasse
75 boulevard du Montparnasse, les mardis, mercredi et jeudi jusqu’au 14 juillet