C’est l’histoire d »‘une rencontre ou plutôt d’une découverte ou encore d’une vie entière consacrée à écrire un journal intime en images.
Franck Landron est né en 1957. L’histoire qui nous intéresse commence véritablement en 1971. Il a 13 ans et ses parents lui offrent un Reflex Canon FTQL.
A Herblay où son père tient un garage, il réalise ses premiers clichés avec ses camarades de classe dans la cour et les salles de classe de son école (à l’insu des enseignants). Ainsi débute ce qui va devenir une véritable œuvre photographique atteignant le chiffre record de près de 300 000 clichés.
Plus tard il étudie l’architecture et le cinéma. Il deviendra journaliste photographe pour la revue « Le cinématographe », puis assistant opérateur dans le cinéma et enfin producteur mais pas que…Quand on lui demande quelle est sa véritable profession, il répond qu’il fait des images, tout simplement. Son parcours professionnel se déroule donc en parallèle de son activité de photographe. Son appareil photo ne le quitte jamais.
Pour Michaël Houlette, Franck Landron a ceci en commun avec JH Lartigue- son aîné de 63 ans- une même volonté de tout enregistrer pour construire un récit, le même goût du jeu, la même liberté et la même constance à l’échelle d’une vie. Comme lui, son travail est réservé à la sphère intime de ceux qui gravitent dans son entourage. Comme lui, son travail ne sera découvert que tardivement: Lartigue a sa première expo a l’âge de 69 ans. Franck, lui s’occupe de cinéma et n’a rien montré de ses clichés pendant 40 ans.
C’est à ce stade de l’histoire qu’interviennent des rencontres déterminantes.
Quand il rencontre Michaël Houlette -fraîchement arrivé à la Maison de la photographie Robert Doisneau, présenté par Olivier Bourgoin -agence révélateur-, Franck Landron est mûr pour montrer ses clichés, mais il n’a pas vraiment conscience d’avoir réalisé une œuvre. Il montre ses images au compte-goutte. Il se pose des questions sur sa légitimité en tant que photographe. Dans les différentes recherches qu’il mène, Michaël Houlette s’intéresse à la photographie dite « humaniste » et notamment à celle des années 70/80. Entre eux, ça « matche » tout de suite. Enthousiaste, conscient d’avoir « une chance inouïe » de réaliser une telle découverte du vivant de l’artiste -contrairement à Vivian Maier qui a connu récemment une consécration posthume- il programme une exposition à la Maison Robert Doisneau dont la date est fixée au mois de juin 2015 soit à peine un peu plus d’un an après leur rencontre.
Le reste suivra: l’édition du livre par Claude Nori (éditions Contrejour), l’exposition à la Galerie Binôme à Paris, l’achat de plusieurs clichés par le Musée Français de la Photographie de Biévres…
Là où réside l’essentiel de la différence par rapport au travail de ses aînés, c’est que Franck se moque bien de la retenue et de la bienséance. Mai 68 est passé par là. L’expérimentation vaut transgression, la liberté est son seul maître. « Car s’il photographie de nombreuses figures féminines, ce n’est pas tant pour les sublimer que pour les déshabiller« .
L’histoire que raconte Franck au fil de ses photos, c’est aussi l’histoire d’une génération est c’est sans doute ce qui nous émeut particulièrement : l’école, l’adolescence, les filles, le garage familial, la mobylette, les vacances, les sorties, la ferme des grands parents, un mariage à la campagne, les départs, des quais de gare, des rails de chemin de fer, le cinéma… le tout ponctué d’autoportraits de l’auteur à différentes époques de sa vie.
L’œuvre de Franck c’est aussi au travers la narration en images d’une vie, celle de la douloureuse nostalgie du temps qui passe et qui ne reviendra plus et la conscience aiguë que tout cela peut s’arrêter demain.
Marie-Pierre Sensey
Exposition OUT TIME Galerie Binôme Paris du 4 sept au 1er oct 2015
Exposition EX TIME Maison de la Photographie Robert Doisneau jusqu’au 4 oct 2015
Catalogue Ex TIME Editions Contrejour sept 2015
merci pour ce texte.
Franck
Apparemment, Franck Landron a retrouvé la femme au bain photographiée par Lisette Model (cherchez sur le web…) !
« Comme lui, son travail est réservé à la sphère intime de ceux qui gravitent dans son entourage »
I disagree http://gris-bleu.fr/2016/11/gloire-tardive-darthur-schnitzler/