Marc Lavoine sans baratin

Honnêtement il n’est pas certain que le recueil de souvenirs de Marc Lavoine aurait franchi la rampe d’un comité de lecture et encore moins fait l’objet d’une présence sur le grand journal de Canal Plus s’il ne s’était agi du fameux acteur du « Cœur des hommes ». Et pourtant l’opuscule, « L’homme qui ment », sorti chez Fayard, se parcourt non seulement sans ennui majeur mais parvient à nous toucher… le temps d’un trajet.

S’agissant d’une personnalité, notre curiosité « people » nous sert de moteur et il convient d’admettre que nos doigts tournent les pages pour constater notamment que Marc Lavoine parle essentiellement de son père, de sa famille et assez peu de lui ce qui le remonte d’un bon cran par rapport à ses pairs.

Il est né en 1962 d’une famille modeste et il aurait dû s’appeler Brigitte ce qui lui valut d’être boudé plusieurs jours d’affilée par sa mère. Un point intéressant est que Marc Lavoine a grandi en banlieue, du côté d’Orly, là-même où il enterre son père dès le début de son livre. Intéressant car contrairement à beaucoup, l’homme ne renie pas la banlieue mais il lui voue au contraire une certaine affection ce qui peut se comprendre étant donné qu’en dehors de Paris, la vie réelle réapparaît, débarrassée des artifices de la capitale. « C’est là que mes années banlieue seraient les plus belles », écrit-il, comparant notamment le vieux Wissous au « paradis sur terre ». Marc Lavoine y tient à sa banlieue, c’est là qu’il a plongé ses racines et l’on sent bien que sa vie d’artiste reconnu ne lui a pas fait changer d’avis.

Plutôt que d’évoquer ses états d’âme, l’acteur et chanteur (1) préfère donc parler de sa famille et singulièrement de son père, de sa vie de travailleur communiste aux PTT, de son statut de survivant d’une embuscade quelque part durant la guerre d’Algérie et de sa boulimie de femmes. Car Lulu Lavoine si l’on peut dire, aimait la gent féminine au point de louer une chambre à Paris pour parvenir plus commodément à ses fins : « Lulu était en forme, il flirtait. Rousses, blondes, brunes, noires, minces, rondes, même les pas très jolies, il les trouvait désirables ». Et il ne fallait qu’il se fasse prendre « la main dans un panty » d’où le titre du livre dédié à son père.

C’est là que l’auteur qui joue avec beaucoup de talent les séducteurs compulsifs dans la trilogie cinématographique du « Cœur des hommes », se dévoile un peu. Car le jeune garçon qu’il est aime déjà les filles. Dans sa classe à l’école il se souvient de trois d’entre elles et leur avait donné, à chacune, sa préférence. « Le monde des femmes me convenait très bien » dit-il et il raconte sans trop de pudeur comment il aimait dormir à proximité des « seins lourds » de sa « mémé » et même qu’il voyait mieux la petite fille qu’elle avait été lorsqu’elle enlevait son dentier. Ce type est d’une tendresse irrésistible qui doit et a dû, de toute évidence, en faire flancher plus d’une. C’est l’homme qui dans ce livre tout en pudeur, se déshabille de son costume de baratineur. Quoique.

Verso de "L'homme qui ment". Photo: PHB

Verso de « L’homme qui ment ». Photo: PHB

Mais c’est bien de sa famille dont il parle avant tout et l’auteur se cache dans la trame comme dans un billet de banque. Tout cela est très réservé. Il conclut un chapitre consacré à son père par un très simple « tu es parti » et autre dévolu à sa mère par un « je te vois vivante ».

Davantage fait pour les filles, ce livre sans doute sincère, force la sympathie durant un temps de lecture qui permet d’aller en RER D du Châtelet jusqu’aux confins de l’Essonne.

PHB

Marc Lavoine. « L »homme qui ment ». Fayard, 17 euros.

(1) Marc Lavoine s’est essayé un jour à l’interprétation du « Pont Mirabeau » d’Apollinaire façon chanteur de charme, il vaut mieux oublier l’incident.

 

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Une réponse à Marc Lavoine sans baratin

  1. person philippe dit :

    Bravo Philipe de vous dévoiler pour nous…
    Car votre article me rappelle certains des miens quand j’ai voulu parler de personnages « populaires », de chanteurs de variété ou de comédiens de téléfilms… Même chose pour tout ce qui passe par le « mélo » ou le « pathos » genre « roses blanches » ou « love story »..
    On n’y peut rien mais on est forcément condescendant… D’où votre pirouette finale sur le RER D… De quoi cacher la larmette indésirable au coin de l’oeil…
    Ah ! Parler de Benjamin BIolay, c’est plus dans nos cordes ! Même si les films qu’il tourne ne sont pas plus des chefs d’oeuvre que ceux tournés par Marc Lavoine… Même si les chansons qu’il chante sont souvent plus faciles que les « Yeux revolver » et que ses avis politiques sont souvent pathétiques alors que Marc a une vraie rigueur morale dans ce qu’il dit… Benjamin a la carte intello, Marc non…
    C’est comme ça… Il faut être Margot Duras pour aimer sans restriction Hervé Vilard…
    Et pourtant Lavoine est un homme sincère que j’ai vu défendre des causes hors tapage médiatique… comme son soutien du premier jour au « Papotin », le journal hilarant des autistes…

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