Du retour d’un tour du monde de l’indigo et après avoir publié un catalogue sur le sujet, Catherine Legrand est l’instigatrice de cette exposition sur le bleu, à la bien aimable bibliothèque Forney. Ce sont essentiellement ses collections vestimentaires qui sont présentées pour ce voyage par procuration et à bien des égards passionnant.
Nous voilà plongés dans l’histoire de cette couleur si plaisante autant que variée puisqu’elle nous explique les deux principales sources de cette teinte obtenue à partir de la culture du pastel, davantage européen, ou de son cousin asiatique plus puissant, le pigment végétal intitulé indigo.
Jusqu’au Moyen Age, la France était garnie de ces fleurs jaunes appelées pastel (ou guède) qui servaient à produire du bleu. Avec les voyages de Marco Polo cependant, l’indigotier venu d’Asie allait faire parler de lui. Quand au début du dix huitième siècle, les restrictions protégeant le pastel tombent, le pigment bleu extrait de l’indigotier, avec sa densité en couleur trente fois supérieure, va s’imposer. La chimie, avec l’Allemand BASF, prendra le relais au siècle suivant. C’est en tout cas dans l’indigo que la toile de jean puisera ses origines avant de devenir célèbre grâce à un certain Levi Strauss parti d’Autriche pour réussir à San Francisco.
L’indigo a par ailleurs eu ses heures de gloire avant le blue jean puisqu’il fallut en extraire des tonnes pour habiller notamment les Grenadiers de Napoléon ou les soldats de la Royal Navy.
Mais cette exposition s’appuie beaucoup sur deux composantes vestimentaires, le bleu du vêtement ouvrier, le fameux bleu de travail, le bleu de chauffe, et surtout l’habillement féminin à travers les différents continents celui qui fait toute la grâce de cette scénographie sur cintre. Entre l’habillement de tous les jours et des tenues féminines glorieuses, le visiteur est à la fête. Le bleu apparaît ici universel, des plaines d’Alsace au Japon en passant par l’Afrique, la Syrie, le Vietnam ou la Chine.
On ne peut qu’aimer ces jupes, ces vestes et tissus variés dont se parent ou se paraient les femmes. La beauté des motifs, la teinte bleue qui se juxtapose à d’autres, témoignent d’une volonté esthétique en forme de compensation ou de résistance vestimentaire à l’égard des contrariétés et aléas divers qui nous accompagnent dans l’existence sans pourtant avoir été invités.
Cette exposition intitulée « Indigo, un périple bleu » mérite bien son nom tant elle nous prend par la main pour nous ramener au temps des caravanes qui convoyaient l’indigo, car c’est bien lui, au fond, la vedette.
Comme on pourrait le deviner le mot vient d’Inde. L’indigo, nous explique-t-on, a fait la fortune des puissance coloniales. Malgré son déclin, en raison, on l’a dit, de son concurrent chimique, il est encore en exploitation au Tamil Nadu, en Andrha Pradesh et au Bangladesh. Il nous est dit que certaines paysannes du Rajasthan ou du Gujarat portent encore de larges jupes imprimées au tampon de bois.
De nos jours on ne va plus chez le teinturier que pour dire que l’on se rend à la blanchisserie car à vrai dire les teinturiers ont disparu. Notre bleu de synthèse ne nous console pas de l’indigo d’antan qui faisaient les redingotes d’Alep ou les robes palestiniennes.
Jusqu’au 18 avril (et après à Clermont-Ferrand). Bibliothèque Forney. Hôtel de Sens. 1 rue du figuier, Paris 4e. (13H/19H)
Très belle exposition, on aimerait qu’elle dure plus longtemps à visiter.
Joli, le bleu à l’âme des teinturiers disparus… ce bleu de Nîmes et ce bleu si répandu aujourd’hui partout dans le monde, bleu de l’uniforme jean’s de tant de gamins et de gamines de tous âges… Dans notre Gascogne, il y eût le Pays de Cocagne… L’expression aujourd’hui semble désuète et charmante. Mais économiquement, ces cocagnes, ces boules sèches de pigments fabuleux, ont fait la richesse de certaines villes , grâce au bleu de la garance… Riches à ne plus savoir comment afficher cet afflux mirobolant… Extraction à l’urine entre autre… Les teinturiers disparus n’étaient guères courus car sentant à vie affreusement mauvais… Et puis l’utilisation ahurissante s’il en est de ces uniformes rouge , blanc et bleu horizon!!! Les jolies cibles bien colorées… Et hop, on changea non à tors les couleurs des uniformes et l’indigo envahit le marché!! Morte la richesse due à la garance… Coût moindre et déjà mondialisation… Aujourd’hui, on peut visiter un joli moulin à Bleu, près de Mirande, à Lectoure, il me semble.. On peut y trouver toute l’histoire de cette richesse passée et acheter de la poudre bleue pour jouer à se faire des bleus sans ecchymoses!!
Oh, la bêtise!!! La garance donne un pigment rouge, l’alizarine des pantalons rouges de nos soldats!! Le bleu des cocagnes provient du Pastel ou Isatis… Je vais me faire scalper par tous les botanistes et chimistes des couleurs encore réveillés!! A cette heure-ci, ils font tous la sieste, non!!! Salut à toi aussi, ma chimiste favorite!!! Une mémoire tinctoriale qui remonte à ta prépa à Orléans en 2003!!! Et à nos vacances dans le Gers… Que d’insouciances encore….