N’est-ce pas férocement décalé que d’aller se délecter en janvier d’un spectacle intitulé Qu’est-ce qu’on fait pour Noël ? Bon, d’accord, on a vu plus téméraire, mais tout de même. N’empêche, ledit spectacle s’apprécie encore après les fêtes, pas de date limite de consommation pour les bons mots de Vincent Roca.
Monsieur l’auteur est (très bien) accompagné sur scène par Jacques Dau. La paire nous offre un ping pong verbal, une partie de billard où la plupart des coups font mouche. « La place de la flamme est au foyer » apprend-on notamment. Ce n’est pas une surprise, mais autant le dire clairement, l’entendre de la bouche de deux comédiens qui se font bien plaisir à nous le déclamer.
Comme ils déclament des dizaines d’autres « bons mots », oui décidément pas de meilleur qualificatif pour ce bon moment de théâtre qu’une succession de bons mots, à la Devos oserais-je, qui impose au spectateur une grande rigueur, une grande concentration. Pas un instant à perdre en se divertissant à reluquer sa charmante voisine, encore moins les autres spectatrices. Ca tombe bien, en fait cette charmante voisine s’avérait à peu près la seule personne de moins de cinquante ans présente ce soir-là (oh ! hors votre serviteur, quand même !!!). Bon, nous étions le 30 décembre, certes la jeunesse n’a pas que ça à faire en cette veille de réveillon que d’aller au théâtre. Le jeune peut encore se rattraper jusqu’au 25 janvier à l’impeccable Lucernaire.
Concentration de rigueur, donc, sprint de plus d’une heure dans la jungle du sujet du verbe et du complément, c’est souvent drôle, parfois émouvant. Les comédiens passent de l’éloge du mensonge à une analyse freudienne du football, du coq à l’âne. Et inlassablement revient la question, que faire pour Noël ? Une joute verbale qui vaut le déplacement. Ce n’est pas mon voisin de devant qui me contredira, il n’en a pas perdu une miette. Il n’a rien vu, mais tout entendu.
Jusqu’au 25 janvier au Lucernaire.