On en a les papilles gustatives tout émoustillées. Et pourtant aucun effluve ne flotte dans la belle salle voûtée de la Cité de l’architecture et du patrimoine où se déroule un voyage au cœur de la cuisine des rues.
A l’entrée, des diaporamas dressent un panorama édifiant de la nourriture servie sur un bout de trottoir d’un bout du monde à l’autre ainsi que des dispositifs de mobilité, parfois surprenants, utilisés par les restaurateurs des rues. A Shanghai, par exemple, les raviolis sont proposés aux clients dans des empilements de paniers de bambou fumants, en équilibre miraculeux sur le porte-bagages d’un vélo. A Madagascar, le ragout de romazava mijote dans de grandes casseroles posées sur des braises à même la rue. A l’Ile Maurice, le vendeur de fruits a fixé une vitrine à l’arrière de sa moto pour mieux les mettre en valeur. Au Vietnam, la vendeuse de pho, parcourt le quartier sa palanche à l’épaule ; l’un des paniers contient la casserole de soupe chaude et l’autre la vaisselle pour la déguster. Aux Etats-Unis, des camions sophistiqués et réfrigérés déploient des trésors de nourriture industrialisée et calorifique.
Jusqu’à présent la cuisine des rues évoquait davantage les pays en développement ou ceux de la malbouffe. Budgets amaigris, temps de midi compressé, espace atrophié… avec la crise les mœurs culinaires changent. Aujourd’hui, même en France, se nourrir dans un espace public peut devenir un nouvel art de vivre et un facteur de convivialité. Encore faut-il savoir réunir tous les éléments pour en faire une réussite : hygiène, espace, portabilité et déplacement des structures, esthétique, convivialité… sont des notions à ne pas négliger.
Les étudiants en art, architecture et design ont été mis à contribution pour donner une nouvelle dimension à cette façon de manger. Un concours de projets de cuisine de rue (Minimaousse) a été lancé sur le thème : «Comment nourrir et se nourrir dans la densité et l’extension infinie de nos villes et comment faire pour que ces moments soient facteurs de sociabilité ?». Le jury a sélectionné trente projets sur les 300 reçus. Ils sont l’objet de cette exposition sur la cuisine des rues.
Esthétisme, originalité, développement durable… les projets des étudiants qui regorgent d’ingéniosité et de talent montrent que le défi a été bien maitrisé.
On mettrait volontiers la main sur l’un des trente maquettes miniatures, exposées dans la salle, tant elles font rêver. Quant aux cinq lauréats, le prototype de leurs projets, réalisé grandeur nature et présenté sous les voutes de la salle, laisse béat d’admiration. Et si l’on n’était pas encore conquis, de petits films d’animation, qui mettent les projets en situation, sauraient nous convaincre que la rue peut prendre le pas sur la restauration traditionnelle.
Rien à redire, ces «popotes des rues» donnent vraiment envie de manger au grand air et de partager un instant de convivialité sur un bout de trottoir. Vive la street-food ! Allez-y vite, il y en a pour tous les goûts (et c’est gratuit) mais plus pour très longtemps !
Jusqu’au 2 décembre. Cité de l’architecture et du patrimoine – Galerie des expositions temporaires – Tous les jours sauf mardi de 11h à 19 h, le jeudi jusqu’à 21h – Entrée libre
Un voyage qui donne envie. Les retardataires espèrent qu’il y aura des prolongations.