Son image obsédante et surtout certifiée conforme hante les halls de gare et les aéroports. «Elle» c’est madame «Nobody». Elle ne sourit pas, son front est dégagé comme le central de Roland Garros un matin de Saint-Sylvestre, ses oreilles sont apparentes, elle représente la norme préfectorale pour les documents d’identité. Elle a été choisie par la société Photomaton pour ses cabines automatiques.
A l’aéroport de Bruxelles, à la gare de Dieppe, elle nous présente un regard froid bien éloigné du temps où il était encore possible de sourire en découvrant les dents avec des cheveux disposés à la vache ou comme on l’entendait.
Inconnue ? Plus tout à fait, car nous avons appelé la société Photomaton dont la marque au passage, remonte aux années 20 alors que l’origine du procédé plonge à la fin du 19e siècle. Eh bien les droits photographiques de cette dame sur ce cliché particulier ont été achetés il y a trois ans à une banque d’images. Elle est mannequin, Allemande et … nous n’en saurons pas plus.
Ce qui est sûr, c’est que l’inspiration ayant conduit à sa pose particulière le jour de la photographie en a fait une anonyme très connue, partie pour s’installer longtemps comme un modèle dans notre inconscient, telle une Marianne ou une Semeuse.
Le seul élément triste, encore une fois, c’est cette norme glaciale imposée par nos sociétés sécuritaires. A la préfecture de Police de Paris, la cabine mise à disposition du public diffuse une voix off qui, de mémoire, dit : «tenez-vous droit, ne souriez pas». Il y a de vieux permis de conduire qui ont du souci à se faire.
L’histoire intéressante de la technique des cabines automatiques, reprise par le site de Photomaton, a été décrite par un Monsieur du CNED, Sébastien Brunet. Et c’est là!
Passionnant ! Voilà qui met de bonne humeur pour commencer la journée.
Qui ne s’est jamais fait portraituré par une photo… »matronche », comme on disait au zinc des bistrots parisiens ?
Le « NE SOURIEZ PAS » m’a intrigué. Le sujet est sans aucun doute passionnant. La liste de ses occupants au fil des années peut-être encore plus. Je repense ce matin à cette scène du film d’Amélie Poulain. Je regarderai ce visage lisse et commun de plus près la prochaine fois. Beau portrait. Merci Philippe. Denis
Je préfère le commandement « souriez vous êtes filmé » !