Ah, l’Amour ! Quel drame tout de même, il vous tombe dessus brutalement, vous donne le sourire niais et vous emplit l’esprit de brillantes étoiles éternelles, pour finalement vous conduire au tombeau. Roméo et Juliette sont tombés dans le panneau, comme en témoigne avec brio la pièce présentée actuellement par la Compagnie des Mille Chandelles dans la Tour Vagabonde.
Cet écrin tout comme l’esprit de troupe, la mise en scène ou les costumes nous transportent plus de quatre siècles en arrière. La scène tout d’abord, cette insolite Tour Vagabonde, théâtre élisabéthain itinérant conçu il y a une quinzaine d’années. Un barnum à la structure de bois et aux murs de bâches pouvant accueillir 250 personnes sur trois niveaux. On se croirait sur les bords de la Tamise plutôt que ceux de la Seine (Pont-Marie en l’occurrence), on va croiser William Shakespeare au parterre de son mythique Globe, c’est certain. Eh bien non, mais on fera bien mieux que de se consoler en découvrant la fougue et la sincérité des comédiens des Mille Chandelles, qui s’en donnent à cœur joie.
Le spectateur est au plus près de l’action, et Dieu sait qu’il y en a, prenez garde au coup d’épée perdu ! Ce plongeon historique est un pari gagné, comme a pu l’être dans un autre genre, résolument plus contemporain et glacial, la mise en scène d’olivier Py à l’Odéon en 2011. On y avait retrouvé avec bonheur le jeune Matthieu Dessertine en Roméo bouleversant.
Au cœur de la Tour Vagabonde, Anne-Solenne Hatte est Juliette. La comédienne est belle et irrésistible comme l’est le personnage aux yeux de Shakespeare. Ce qui n’est pas sans poser un problème, la comédienne en a visiblement conscience. Baptiste Belleudy en Roméo n’a pas ce problème. Il n’en est pas moins convaincant. Certes, il est déjà chef de troupe et metteur en scène. Alors que l’amour pétrifie Juliette, Roméo virevolte avec appétit sans relâche pendant les trois heures que dure le spectacle. Une éternité qui ne laisse pourtant pas le temps de s’ennuyer, tant les numéros se succèdent, de la romance à
l’action, du rire aux larmes.
Les amants de Vérone ne sont pas seuls en piste. Le projet des Mille Chandelles et de la Tour Vagabonde nous offre deux autres pièces. A partir du 24 avril, un spectacle jeune public écrit par Damien Bonnel, Bla di bla di bla, un « voyage initiatique » dans l’univers de William Shakespeare qu’on nous promet « vivant, interactif, mêlant gags, chansons et magie ». A partir du 21 mai, la troupe donnera « Comme il vous plaira », de William Shakespeare, dont les répétitions sont, quelle bonne idée, ouvertes au public.