C’est Elizabeth, 6 ans, qui a été choisie pour figurer sur l’affiche. Au Kenya, dans le bidonville où elle vit, deux heures de marche à pied la séparent de l’école. La photo la montre en train d’enjamber une ravine. Elle dit qu’elle a peur lorsqu’elle se retrouve toute seule dans une ruelle car quelqu’un pourrait la tuer. Ses copines marchent groupées pour éviter les agressions. Selon les professeurs de la « Kibera School for girls », au moins 20% des filles auraient déjà été violées.
Sur les grilles qui entourent à Paris les bâtiments de l’Unesco se tient jusqu’au 3 mai et à ciel ouvert, une exposition photographique sur les « chemins de l’école ». Parmi les organisateurs, on compte le transporteur Transdev et surtout l’agence de photoreportage SIPA. Cette dernière a fourni les travaux de plusieurs de ses photographes, illustrant de maintes façons le trajet des écoliers.
Alfred Yaghobzadeh a ainsi suivi Paban, un petit garçon de 8 ans, depuis la rue de Calcutta où il dort, jusqu’à la « Model School » qui accueille les enfants démunis. Comme d’autres, il vient des quartiers pauvres de Kalighat et de Lock Gate. Il suit, «impeccablement habillé», des parcours incertains jusqu’à l’école. A Misrata, en Libye, une fillette saisie par l’objectif d’Olivier Jobard, passe bien malgré elle des chars en revue sur l’itinéraire qui la conduit vers sa classe.
On est bien évidemment interpellé par ces reportages affichés dans ce quartier chic de l’Unesco qui ne compte aucune embûche à même d’effrayer un écolier. Pourtant, toutes les histoires proposées aux passants ne sont pas forcément l’expression de la misère. Elles reflètent aussi les conditions de transports d’enfants pas tout à fait comme les autres du fait de leur localisation géographique. A Maripasoula en Guyane, c’est en pirogue que l’on emprunte le chemin des écoliers tandis que les enfants de l’île de Houat en Bretagne embarquent sur un bateau.
Ce diaporama du périple scolaire est réussi. Il ralentit le pas des piétons et freine le joggeur dans sa course. Comment ne pas éprouver de la sympathie pour ces gamins qui s’appuient jusqu’à deux heures pour l’aller et bien évidemment la même chose pour le retour. La durée, le danger, ne viennent pas à bout de leur obstination.
Ce tour du monde ne vous prendra pas deux heures. Le travail réalisé par cette vingtaine de photographes est tout à fait remarquable. Selon l’Unesco, 61 millions d’enfants et 71 millions d’adolescents ne vont pas en classe.
Bien qu’elle doive emporter une tenue de rechange au cas où elle tomberait sur le chemin de l’école, malgré qu’elle a parfois faim faute de petit déjeuner, en dépit des dangers qu’elle encourt tous les jours, Elizabeth trouve le monde «beau».
Notre insupportable légèreté est parfois si pesante