Le sujet de la représentation du corps dans les arts arabes justifie-t-elle une exposition ? On se pose parfois la question lors de la visite de la manifestation «Le corps découvert», organisée sur deux niveaux à l’Institut du Monde Arabe. L’ensemble manque un peu de consistance mais pas d‘intérêt. Il faut y aller en explorateur de grenier avec l’espoir non déçu d’y faire des découvertes.
Les organisateurs de l’exposition ont d’abord eu le bon réflexe de ne pas aller chercher une logique de présentation alambiquée. L’affaire se décline de façon chronologique et c’est tant mieux. Il y a eu une génération de peintres arabes qui sont venus chercher en Europe, à la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle, un savoir-faire pictural. Comme le confie Philippe Cardinal (1), le commissaire de l’exposition, ils ont été «ébahis» par les «clichés orientalistes» qui prévalaient à ce moment-là en Europe, faits de «plaisirs licites et débridés» dans des harems fantasmés. Ils y ont aussi trouvé un certain académisme dont ils ont tenté de se dégager.
Tous ces corps dénudés plus ou moins alanguis contribuent, dès le premier niveau, à ralentir le pas. L’ambiance est bizarrement aussi intense que s’il s’était agi d’une thématique fondée sur la le pique-nique ou la marine à voile. Le regard se pose sur chaque œuvre avec une langueur séraphique. Nous ne sommes pas au Musée d’art moderne et l’idée de faire sursauter le visiteur n’a pas été retenue. Attention, avis de grand calme.
Plus que le corps c’est la représentation de la modernité arabe dans son expression picturale, graphique, sculpturale, qui force (enfin) l’intérêt.Certaines œuvres des années trente et plus encore les années soixante dix (« Les amoureux, Mona Saudi ») jusqu’aux années deux mille (Mohamed El Rawas) délivrent une énergie à même d’être ressentie. On en oublie d’ailleurs, à les apprécier, qu’elles s’inscrivent dans le cadre d’une exposition sur le corps découvert dans l’univers arabe. Zut, on vient encore de mettre le doigt sur le hiatus.
(1) Au numéro spécial du magazine « Art Absolument » distribué à l’entrée
Jusqu’au 15 juillet 2012