Sous le marivaudage couve la crise. Un couple, deux époques, le milieu du 19e siècle et le 21e siècle. Le temps passe, les sentiments se répètent inlassablement. Un même lieu, un appartement bourgeois aux abords du Parc Monceau, quel romantisme. Tout en finesse, «Il faut je ne veux pas», spectacle créé en 2010 aujourd’hui repris au Théâtre de l’Œuvre, nous entraîne dans les méandres de la déclaration amoureuse. Ou plutôt dans le délicat passage de la parole à l’acte. Alors, tu veux ou tu veux pas ? Eux ne savent pas visiblement, mais le destin les rapproche et les unit.
La structure du spectacle elle-même est intéressante. Il me faut en dire un peu mais pas trop. Jean-Marie Besset, qui met en scène l’ensemble, a écrit «Je ne veux pas me marier». Il appelle à la rescousse Alfred de Musset, qui, bon prince, lui accorde «Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée». Les textes sont charmants, alternativement doux et tranchants. Jean-Marie Besset interroge son illustre prédécesseur, il nous livre sa vision du couple et du mariage cent cinquante après Musset. Et ce n’est pas toujours le paradis, loin s’en faut, même à la veille de mariage.
La marquise a cédé la place à une professeur agrégée de mathématiques, le comte à un jeune cadre bancaire «membre du cabinet du ministre du budget», mais le jeu de la séduction reste le même dans le fond. Trois jeunes comédiens campent à merveille la retenue du couple romantique en 1845 ou la décadence du couple contemporain de 2008. Par la fenêtre de leur même appartement bourgeois, les marronniers défient le temps, témoins silencieux.
Hier comme aujourd’hui, on est tour à tour séduits par les maladresses des apprentis amoureux et agacés par leurs interrogations. L’homme est volage, la femme indécise, mais ce n’est qu’une facette. Car la vie de couple est un équilibre permanent, ce que nous conte délicieusement «Il faut je ne veux pas». Une réussite à voir. Même à deux.
Et le délicat passage de l’acte à la parole…