Inaugurée en 2007 et logée au cœur du Palais de Chaillot, étagée sur plusieurs niveaux pour épouser la colline du Trocadéro, la Cité de l’Architecture et du Patrimoine est un des plus étonnants musées de Paris : avec ses 22.000 m2 dans le 16e arrondissement, elle est le plus grand centre d’architecture au monde. Une bonne occasion pour la découvrir est sans aucun doute de filer voir l’exposition organisée autour de «l’hôtel particulier, une ambition parisienne», présentée jusqu’au 19 février 2012, et typique de cette architecture française qui ne s’exporta jamais ailleurs.
L’hôtel particulier y est comme un concentré de luxe, revu et corrigé par la grande bourgeoisie du 19e siècle, rivalisant dans ses décorations et sa débauche de marbre, pour être l’apanage d’une classe sociale avide de s’approprier les codes de l’architecture princière.
La Cité de l’Architecture a choisi une scénographie qui permet de déambuler comme au rez-de-chaussée d’un de ces hôtels particuliers : du vestibule à la chambre à travers salons et salles de réception, jusqu’à la galerie et au jardin. Mobiliers et tableaux mais aussi boiseries et tapis permettent d’en faire une visite sensitive, pour mesurer les volumes et l’hédonisme quasi sensuel de ces hôtels de luxe, où l’esprit de fête était la règle. Ce n’est pas un hasard, si leur construction s’éteignit dans les années 1930 avec la grande crise.
L’exposition présente aussi des maquettes des plus beaux de ces hôtels avec des panneaux didactiques. Et si l’on n’en retient qu’un seul, ce sera peut-être le Palais Rose : à lui seul, il symbolise toutes les folies de la Belle Epoque, avec sa profusion de marbres roses et son faste inspiré par le grand Trianon: construit avenue Foch, il était la propriété du comte Boniface de Castellane, dit Boni. Parfaitement désargenté, mais grand amateur de fêtes somptueuses, Boni choisit de se marier avec une riche héritière américaine pour s’offrir cette folie architecturale uniquement conçue pour des réceptions dignes de Versailles.
Des quelque 500 hôtels particuliers disséminés dans Paris, beaucoup ont disparu, rabotés ou détruits par les travaux haussmanniens pour ouvrir les grandes avenues, puis confisqués par les promotions immobilières: la République s’est appropriée les plus beaux, de Matignon à l’hôtel de Sully pour y loger se ministères ou ses institutions culturelles, certains autres ont été transformés en musées ( Carnavalet, musée Rodin) ou en hôtels de luxe ( le Shangri La, le Crillon…). Il reste le plaisir d’aller y faire un tour les jours d’ouverture des monuments historiques…
Voilà qui donne envie de s’y rendre, histoire de s’imaginer riche quelques instants, à peu de frais et sans faire de mal à quiconque en ces temps o combien difficiles…
Sans Boni ni bonus…
Merci pour la visite !