« Any Ever », décadent et réjouissant

Loufoque, dégénérée, absurde, décapante, l’exposition « Any Ever » qui vient de débuter au Musée d’art moderne a tout pour plaire. Elle étonne, elle détone et Jésus, ça fait du bien. Par moment cela rappelle les audaces publicitaires de Jean-Paul Goude avec la marque Perrier. L’exposition signée Ryan Trecartrin et Lizzie Fitch s’affranchit dans une large mesure des codes visuels auxquels nous sommes habitués autant qu’elle peut aussi les mélanger.

 

Quand vous rentrez dans la salle de l’exposition commencez par la droite, vous arriverez vite dans une salle de projection vidéo et vous aurez tout de suite un énorme échantillon de ce qui vous attend dans les autres salles.

En cette journée d’ouverture, le 18 octobre, il y avait cette dame assise de travers sur deux sièges d’avion qui semblait avoir trouvé la bonne pause, casque sur les oreilles, pour profiter de la projection. Et là… trame commune à toutes les vidéos de Ryan Trecartrin et Lizzie Fitch, vous voilà aspiré dans la conduite d’une prise d’air qui vous conduit vers des images folles, dégénérées donc, qui semblent être le résultat de deux adolescents dont la création artistique serait à la mesure d’un ennui immense.

L'affiche de l'exposition (Negative Beach) à l'entrée du Musée d'art moderne. Photo: Les Soirées de Paris.

C’est à la fois vilain et hygiénique, réjouissant, décadent, drôle et libérateur. Libérateur, parfaitement. Les éléments sonores sont distordus, sciemment délabrés ou accélérés afin de donner à un banal blabla d’adolescent une portée agressive et ravagée. Et ces sensations composites sont démultipliées sur sept vidéos.

C’est pour cela qu’il faut commencer par la droite en entrant car la suite de l’exposition, après les films, vire au calme plat avec la présentation des œuvres sculptées des deux artistes. Là aussi on s’étonne des amalgames insolites d’objets qui donnent à la sculpture sa forme finale. Ryan Trecartrin et Lizzie Fitch achètent des objets dans des magasins de bricolage et ils les utilisent comme des «vocables» pour en faire des réalisations qui nous laissent amusés ou dubitatifs.

Nés tous les deux en 1981 ils devaient bien s’ennuyer dans les deux Etats où ils ont vu le jour, respectivement l’Indiana et le Texas. L’ennui on le sait, peut être une bonne école créative mais les deux artistes sont également passés par la Rhode Island School of Design. Ils vivent désormais à Los Angeles. Cette exposition raconte en quelque sorte l’histoire d’une double émancipation, qui donne envie au visiteur à la sortie, d’envoyer tout ce qui l’encombre au diable.

Se faire une idée en vidéo.

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