Olivier Py, le tourbillonnant directeur du Théâtre de l’Odéon, n’a pas attendu l’annonce surprise du non-renouvellement de son mandat à l’issue de l’alléchante prochaine saison pour faire feu de tout bois. Il est au four et au moulin, mais pas sur scène, pour nous présenter en ce moment la suite des aventures d’Eschyle. Et c’est une sacrée leçon de théâtre.
Soit une trilogie, Les Sept contre Thèbes, Les Suppliantes, et Les Perses, courtes pièces (une heure) présentées en alternance ou en intégrale le samedi jusqu’au 21 mai. La troisième pièce, créée pour l’occasion (les deux autres ont été créées à l’odéon en 2009 et 2010), sera en outre présentée «hors les murs» jusqu’au 17 juin.
Bref, le boulimique Olivier Py assure la traduction, l’adaptation et la mise en scène. On en ressort l’esprit léger, juste heureux d’avoir assisté à la démonstration présentée dans le Salon Roger Blin (ah les anciens auront reconnu le « Petit Odéon », certes, mais remis en bon ordre question dorures et peintures murales). Tout en longueur en son milieu, un podium, oui comme ceux des défilés de mode. Deux rangées de chaises de chaque côté, une soixantaine de spectateurs.
Laissons la place aux comédiens, j’en parle trop tard pour les laisser se faire désirer. Ils le méritent. Un trio, tragique comme il faut, déclamant avec grande classe un texte où il est question d’Argos mais pas de balise. Mais on finit par s’y retrouver. Mireille Herbstmeyer, Philippe Girard et Frédéric Giroutru sont impeccables. Ils nous surplombent du haut de l’estrade, et c’est peu de dire que si proches d’eux ils nous assomment par la puissance de leur jeu. Il n’y a pas d’artifice, juste trois comédiens nus pour ainsi dire avec pour seule arme le texte.
Ce dernier date du 5e siècle avant Jésus-Christ. Monsieur le Directeur lui a offert un lifting, une fine adaptation de la forme à notre époque. «Qui peut connaître la volonté de Zeus ?», «Qui peut dire où nous mènera la mer ?». Personne à dire vrai, surtout pas ces Suppliantes (Le choix des Soirées de Paris), fuyant l’Egypte pour trouver refuge en Grèce. Quel accueil leur sera réservé, telle est l’intrigue. Le texte prend naturellement le parti de ces «étrangers (qui sont) sont très peu écoutés», car les aider bien sûr «apporte le bonheur». «Ne refuse pas l’asile aux exilés échoués sur ton rivage» implorent les Suppliantes, poussées par l’espoir que «la justice d’en Haut protège les misérables», qu’elle «reconnaît les coupables». Ce florilège pour tenter de mettre en lumière la brûlante modernité de la quête des Suppliantes. Le Roi grec s’en remettra à la décision de son peuple pour décider de leur sort.
PS : Cerise sur le gâteau, à 12 euros le plein tarif, ce serait péché de ne pas tenter de décrocher un siège Salon Roger Blin.