Avec la nature des dessins qui seront exposés par Christie’s les 29 et 31 mars prochains, nous sommes loin, très loin des graphismes dérangeants et parfois dérangés d’aujourd’hui. Du moins pour ceux qui sont promis à la vente organisée du 1er avril. C’est l’élégance globale, l’ambiance surannée, la désuétude du propos qui séduisent s’ils ne nous font pas bâiller et en fait c’est selon.
S’attarder sur les dessins présentés par Christie’s est aussi une forme de rébellion contre la dictature de l’action, qui frappe aujourd’hui toutes les générations, du berceau jusqu’à la maison de soins palliatifs. Installons-nous en imagination sur une bergère d’une époque forcément révolue et anéantie par les designers pour observer la scène en apparence absolument inerte d’Hubert Robert (1733-1818) «fameux représentant du dessin français» de cette époque. Au moins trois personnages se cachent dans le paysage, peut-être plus encore si on le met à l’envers. Exécuté à la sanguine en 1774, ce dessin est estimé entre 20 et 30 000 euros. Un choix parfait à accrocher à côté ou la place du Basquiat du salon.
Mais la palme de l’élégance, qui aurait aussi pu faire un très bel ornement de boulangerie de province, ou encore le logo d’une marque de chocolats à l’ancienne, c’est la « Femme dans un parc tournée vers la droite, autrefois dite Mme de Pompadour », pastel réalisé sur papier par François Boucher (1703-1771) et son atelier. Il fut présenté aux enchères dès 1845 lors de la vente de la collection du marquis de Cypierre, dont la famille acquit le château d’Auvilliers autrefois propriété de Jeanne-Antoinette de Pompadour. Ajoutez un peu de ressemblance et le rapprochement sera bientôt fait ce qui fut le cas. Difficile de faire plus sage et moins sexy toujours est-il qu’avec 100 à 150 000 euros elle parera votre salon à côté ou en remplacement d’une reproduction de Bardot par Richard Avedon.
Faites attention aux lapsus de prononciation parfois gênants si vous vous intéressez aussi à «la flagellation» de Giovanni Domenico Tiepolo (1969-1770). Elle est plus abordable que les deux premières (entre 8 et 12 000 euros). C’est la Passion du Christ et l’intérêt de l’affaire est que le bourreau file un coup de pied en vache au fils de Dieu ce qui n’est pas sans rappeler le vilain soufflet du bourreau en 1793 sur les joues de Charlotte Corday qui venait d’être décapitée.
Et c’est pendant deux jours, du 29 au 31 mars, 9 avenue Matignon chez Christie’s.