Tchéky Karyo, fauve en cage

 

Le fauve tourne en cage. Il va mourir. Lui qui a conquis le Monde, il vit ses derniers instants dans l’intimité de sa chambre. Nous sommes à Babylone, en l’An 323 avant Jésus Christ, et Alexandre le Grand sait qu’il s’éteint. «Depuis le Gange je n’ai fait que mourir» se lamente-t-il, évoquant l’instant où face à l’émouvante supplique d’un vieux soldat il consent à faire demi-tour pour regagner la Grèce.

Sur un texte de Laurent Gaudé, Tchéky Karyo campe avec brio cet homme exténué qui dialogue avec la mort. Pas pour la repousser, mais bien pour l’accueillir, lui signifier qu’il entend maîtriser jusqu’à sa dernière mise en scène, celle de sa propre mort. Alternativement homme le plus puissant et le plus humble au Monde, Alexandre revient sur ses exploits guerriers, le siège de Tyr, la mort de Darius, la fidélité de Bucéphale, la charge des éléphants.

Tchéky Karyo a la carrure et l’allure de ce chef de guerre, il en restitue tout aussi délicatement les moments de doute voire de repentance. Si le comédien est un fauve en cage face au public du charmant Théâtre Ouvert (une étroite impasse pavée, la vue sur le dos du Moulin Rouge quand on prend l’escalier, un accueil agréable, une restauration à prix doux (pas testée), ah voilà la belle soirée …), le Tigre bleu de l’Euphrate est celui qui par hallucination trace le chemin du conquérant. Alexandre veut le suivre, toujours plus loin.

La mise en scène de Michel Didym au Théâtre Ouvert (en partenariat avec le Théâtre de la Ville) n’est pas bouleversante (difficile de créer un ballet avec un comédien seul), et le décor plutôt kitsch, mais le spectacle gagne beaucoup grâce à la «création musicale» de Steve Shehan, qui l’interprète chaque sur scène soir accompagné de la violoncelliste Charlotte Castellat.

Le Théâtre Ouvert 

Le Tigre bleu de l'Euphrate. © Archives festival de Naples

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