Excellent sujet que les ravages potentiels de la téléphonie mobile sur notre vie privée. Il n’est que de voir ces passants ou usagers du métro complètement dans la lune, étrangers au monde qui les entoure, pour comprendre qu’il y a là un potentiel créatif. Au Bouffon Théâtre et jusqu’au 13 juillet c’est plus précisément les dégâts occasionnés par la contrainte des mises à jour, qui a conduit une petite troupe à interpréter une pièce expérimentale, très logiquement intitulée « update », soit la traduction de « mise à jour » dans le monde anglo-saxon.
Cette pièce met principalement en scène un couple que les…mises à jour continuelles, vont dégrader jusqu’à la destruction. La mise en scène est particulière puisqu’elle débute par une ambiance très boulevard, se prolonge en farce et s’achève dans l’angoisse existentielle de l’humanité vaincue par la technologie.
La démonstration est bien menée jusqu’à son terme par des acteurs sous tension mais l’ensemble aurait gagné en efficacité en se limitant aux trois personnages qui portent l’histoire, soit le couple et une amie du couple rendue hystérique par son largage du monde réel au profit de l’univers 3G où même les morts ressuscitent. Vous avez Lucifer en ligne, sauf qu’il prend, dans la pièce, un pseudonyme particulièrement bien trouvé.
Le personnage central, interprété avec conviction et efficacité par Cléo Anton, perd ses cartes sim, s’inquiète de la sortie d’un nouveau modèle de smartphone avant de se voir happée par le tourbillon de la grande chasse d’eau technologique et après avoir évidemment tout perdu, y compris son compagnon qui préfère opter de son côté pour l’abdication conjugale et l’évacuation sanitaire.
C’est notamment une facétie technologique de son téléphone portable qui a récemment compromis un homme politique soucieux de fuir les impôts. Aussi, combien de ruptures sont dues à des inquisitions menées dans la mémoire des téléphones ou à la géolocalisation? Combien de fois des petits drames amplifiés par des opérateurs implacables et mal élevés sont venus ternir notre humeur cette année ? Ce genre de pièce donne du sens à un précepte émergeant consistant à « reprendre en main le contrôle de son destin ». A vrai dire c’est un peu mal parti.
Bonne idée de mettre en scène l’exaspérant « t’es où ? »…
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